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Numéro 15

15 | 2023

Toujane
Modèle d’Organisation de l’Espace, Paysages et Architecture Vernaculaire dans un Village Perché à Djebel Matmata (Sud-Est de la Tunisie)

nom de l'auteur

Table des matieres

Résumé

La multiplication des travaux sur la montagne en général, et notamment sur le Sud-Est de la Tunisie (Chaîne Matmata-Dahar), autour des questions du peuplement, de la mise en valeur des altitudes par les montagnards et de l’architecture vernaculaire a progressivement alimenté nos connaissances sur ce monde. Ces études ont conduit à la remise en question de plusieurs idées traditionnellement associées à l’histoire de cette région. Entre les caractères géographiques et la volonté humaine, les contraintes de la topographie et du climat et les solutions proposées par l’Homme, cette étude propose une contribution pour la lecture d’un lieu chargé d’histoire (Le village de Toujane et de son territoire). L’impact de l’Homme dû à l’occupation successive sur ces géomorphosites a remodelé et transformé ce genre de sites du Dahar en géomorphosites culturels qui présentent une symbiose entre un patrimoine géomorphologique, résultat d’une longue histoire de la terre, et un patrimoine culturel issu d’une longue expérience/action de l’Homme dans ces montagnes.

Notre contribution, qui concerne dans ce papier le village de Toujane à Djebel Matmata, est une recherche interdisciplinaire croisant plusieurs approches :

    1. La relation Homme/Milieu en essayant de voir l’interaction humaine avec la Nature.

    2. L’approche de l’archéologique extensive en exploitant un terrain montagneux.

    3. C’est aussi une lecture du milieu habité afin analyser un modèle d’urbanisme spécifique.

    4. Ce papier propose aussi une analyse ethnoarchéologique de l’architecture vernaculaire dans ses dimensions multiples : espace, matériaux et techniques de construction.

Mots clés

Toujane, paysage, architecture vernaculaire, Dahar, Matmata, urbanisme, village perché, montagne, géomorphosite.

Abstract

The multiplication of works on the mountain in general, and particularly on the southeast of Tunisia, around the issues of settlement, the development of altitudes by mountain people and vernacular architecture has gradually fed our knowledge of this world. These studies have led to the questioning of several ideas traditionally associated with the history of this region. Between the geographical features and human will, the constraints of topography and climate and the solutions proposed by Man, this study proposes a contribution to the reading of a place full of history. The impact of Man due to the successive occupation on these geomorphosites has reshaped and transformed this kind of sites of the Dahar into cultural geomorphosites that present a symbiosis between a geomorphological heritage, result of a long history of the land, and a cultural heritage resulting from a long experience of Man in the mountains.

Our contribution, which concerns in this paper the village of Toujane in Djebel Matmata, is interdisciplinary research crossing several approaches:

    1. The relationship Man / Environment by trying to see the human interaction with nature.

    2. The approach of the extensive archaeology by exploiting a mountainous ground.

    3. It is also a reading of the inhabited environment in order to analyze a specific model of urbanism.

    4. This paper also proposes an ethnoarchaeological analysis of vernacular architecture in its multiple dimensions: space, materials and construction techniques.

Keywords

Toujane, landscape, vernacular architecture, Dahar, Matmata, urbanism, perched village, mountain, geomorphosite.

الملخّص

تأتي هذه الورقة حول قرية توجان الجبلية الواقعة جنوب سلسلة جبال مطماطة في تناسق مع موضوع النّدوة العلميّة التي اقترحها مخبر الآثار والعمارة المغربية بجامعة منوبة وفي سياق مراكمة الأعمال العلميّة حول الجبال بشكل عام وحول جبال الجنوب الشّرقي للبلاد التونسيّة بشكل خاص. يتعلق هذا المبحث بمسائل تهم تاريخ المجتمعات الجبليّة والتوطّن والتّعمير وطرق تهيئة المرتفعات واستحداث عديد النّماذج من أشكال السّكن والسّكنى واشتغال الأرض من قبل سكّان الجبال واستنباط عمارة محليّة خصوصيّة في تصوّراتها المعماريّة وطرق البناء والمواد المستعملة في إنجازها والتي ساهمت في جعلها أوابد فنيّة شاهدة على حضارة صمدت إلى اليوم. ساهمت هذه الدّراسات باختلاف مواضيعها ومناهجها، بشكل كبير، في تعميق معرفتنا بعالم الجبال ومجتمعاته. مكّنت هذه المراكمة من تصحيح عديد الأفكار المرتبطة بهذا المجال ومن إضافات قيّمة حول تاريخ البلاد التونسيّة عبر العصور وحول أشكال من التّعمير ومن صنوف البناء لا نكاد نعثر على نظائر لها خارج الجبال. هذه الأعمال هي أيضا مساهمة منّا في صون التّراث الجبلي وتوثيقه في مختلف أوجهه الماديّة منها واللاماديّة التي تندثر بشكل متواتر أمام نسق التحوّلات المتسارعة.

بين الخصائص الجغرافية الصعبة والمنفّرة والإرادة البشرية الصلبة، بين قيود التضاريس والمناخ والحلول التي اقترحها الإنسان والتي تعبّر عن قريحة معماريّة ومعرفة بالمجال، هذه الدراسة مساهمة في قراءة مجال ثري من حيث تاريخ تواجد الإنسان به ومن حيث المخلّفات الماديّة التي نساهم في قراءتها وتوثيقها (الرفوعات الهندسيّة والصور وتجميع الروايات الشفوية وغيرها). لقد راكم الإنسان، عبر استقراره في المجال الجبلي تعميره منذ عصور ما قبل التاريخ إلى اليوم، تجربة عميقة في التعامل مع هذه المواقع التي تختزن بدورها ذاكرة الأرض عبر ملايين السنين من العصور الجيولوجية وفعل عوامل الطبيعة في نحت أشكال التضاريس المميّزة لهذه السلاسل الجبلية. نتج عن ذلك إعادة تشكيل وتحويل هذا النوع من المواقع في جبال مطماطة وبني خداش وتطاوين ونفّوسة بليبيا إلى مواقع جيولوجية ثقافية (أصبحت اليوم حاضنة لمشاريع سياحة ثقافية تساهم في تنمية المجلات الجبلية) فيها تداخل بين التراث الجيولوجي والجيومورفولوجي، كنتيجة لتاريخ الأرض الطويل، وتراث ثقافي ناتج عن خبرة طويلة للإنسان في التعامل مع خصوصيات الجبال كتضاريس صعبة والتطرّف المناخي المميّز لها. مساهمتنا في هذا الندوة هي بحث متعدّد التخصّصات يحاول أن يجمع بين قراءة خصائص المجالات الجغرافيّة في محاولة لفهم رؤية الانسان في تفاعله مع الطبيعة وقدرته على إنتاج ثقافة ماديّة. وهي أيضًا محاولة في قراءة أشكال التّعمير التي استنبطها الجباليّة من أجل إنشاء عمران يتماشى مع احتياجاتهم وإمكانياتهم وأذواقهم. تقدّم هذه الورقة أيضًا تحليلًا وتوثيقا إثنوأثريّا للعمارة بأبعادها المتعدّدة: تصميم الفضاء ومواد البناء والتقنيات المستعملة.

الكلمات المفاتيح

توجان، مطماطة، التعمير، الظاهر، العمارة الجبلية.

Pour citer cet article

Boukhchim Nouri et Sekmani Asma, « Toujane : modèle d’Organisation de l’Espace, paysages et architecture Vernaculaire dans un village perché à Djebel Matmata (Sud-Est de la Tunisie)», Al-Sabîl : Revue d'Histoire, d'Archéologie et d'architecture maghrébines [En ligne], n°15, année 2023.

URL : http://www.al-sabil.tn/?p=6315

Texte integral

Introduction

Le relief monoclinal de la chaîne de montagnes du Sud-Est de la Tunisie qui a joué un rôle stratégique depuis l’histoire antique de la Tunisie représente jusqu’à nos jours une zone densément peuplée et excite les chercheurs de toutes les disciplines scientifiques ainsi que les explorateurs et les artistes. Étant une zone de frontières (Limes Tripolitanus) à l’époque romaine, une zone d’implantation Ibadite durant la période islamique précoce et un territoire de conflits durant plus d’un siècle à la période islamique moyenne, ce vaste territoire allant de la plaine de Djeffara à l’Est jusqu’aux dunes du sable vers l’Ouest représente une plaque tournante dans tout l’espace de l’Ifriqiya et le Maghreb. Dans cet espace géographique assez stratégique, un mode de vie s’est créé, par la population, durant des siècles. Outre les spécificités de la population formée par des tribus nord africaines qui ont occupé, peuplé et mis en valeur ce territoire montagneux, un modèle économique prospère basé sur trois axes (agriculture, transhumance et commerce) se met en place progressivement.

Depuis des années, les recherches sur terrain focalisent l’intérêt aussi sur cette symbiose entre un patrimoine géomorphologique et un patrimoine culturel, entre le paysage et l’histoire, entre l’organisation de l’espace et le savoir-faire (culture matérielle, architecture, aménagements hydroagricoles, patrimoine immatériel etc). L’analyse de ce type d’habitat dans une région montagneuse très accidentée nous a conduit à percevoir la richesse de ces sites perchés. Toujane, sujet de notre étude dans ce papier et les autres sites similaires, sont le conservatoire de l’identité culturelle des montagnards.

1. Le cadre naturel

1.1. Paysage naturel et occupation du milieu

      1.1.1. Situation du village

Faisant partie de la chaîne montagneuse de Matmata-Dahar dans le Sud-Est de la Tunisie, Toujane est situé dans la partie Sud-Est appelée Djebel Toujane qui se poursuivie en profondeur vers l’Ouest jusqu’à Djebel Zmertène. Ce massif contrôle la plaine étendue sur une région étroite de 30 km de large jusqu’au golfe de Gabès. Cette plaine, appelée aussi A’radh-Djefarra, est densément peuplée depuis l’antiquité2. Une concentration de sites et de villages au bord de la mer sur la route historique reliant la Tunisie avec l’orient et qui continue de jouer le rôle de l’axe principal de circulation des hommes et des marchandises. Sur cette bande de terre un nombre important de sites attesté par les sources et recensé par le projet de la carte archéologique montre bien un peuplement antique dense durant la période qui s’est poursuivi durant la période islamique précoce prouvé par les sources notamment les textes Ibadites, les recherches archéologiques et les études récentes.

La côte du golfe de Gabès est riche en sites et vestiges archéologiques. Zrigue زريق, Kattana كتانة , Zerkineزركين, El-Ghandri الغندري, Oued el Ghirène وادي الغيران, El Ghroâa القرع , Zarat الزارات , Mareth مارث et Arram عرام sont des localités qui ont évolué à travers le temps. Vers l’ouest d’oued El Ghirène commence une deuxième ligne de localités /sites au pied des monticules de Zaggaba زقابة . En montant vers l’ouest en direction du massif des Matmata, le paysage change avec l’altitude. A partir de Zaggaba زقابة, Ouarifen واريفن , Tounine تونين , ksar Ezzit قصر الزيت , béni Khlil بني خليل , on trouve un groupement de villages curieux creusés latéralement dans les flancs du Monts des Matmata situés sur les sommets et la façade Est du Djebel des Matmata. Du sud vers le nord figurent les villages de Toujène توجان, Tounine تونين, Ksar Ezzit قصر الزيت , Jouabit جوابيت , Braouka براوكة , Kherbet ben Ahmed, les ruines d’un village sur un éperon escarpé qui figure sur la carte topographique sous le nom de village de Thalet, El Kherba الخربة , M’zataمزاتة , B’guiy بقيّة et béni Zalten بني زلطن.

Toujane, sujet de notre étude, est un village parmi ce groupement perché à mi- pente de cette façade Est de Djebel Matmata, à l’extrémité Sud du la cuesta, bénéficiant d’une vue dégagée jusqu’à la mer3.

Fig. 1. Carte de localisation de la région de Toujane.
Réalisation : Tarek Ben Fraj.

      1.1.2. Paysage naturel et Géomorphologie du Terrain4

Dans cette partie de la Tunisie méridionale riche en héritage géologique et culturel, on distingue deux domaines géologiques et géomorphologiques différents. Le premier celui de la plaine de Djeffara à l’Est et la chaîne du Dahar à l’ouest. Cette dernière est constituée par les monts de Matmata qui dominent la plaine de A’radh et Djeffara et culmine à 713 m d’altitude à Kef Ennsoura et 630 m à Toujane. Ce plateau se prolonge vers le sud et se constitue d’une succession de collines arrondies, de sommets et de falaises verticales, émergeant de grands cônes occupés par la population pour ériger des points de contrôle ou des ksar-villages. D’énormes oueds profondément creusés par l’érosion durant le Quaternaire caractérisent le paysage et représentent un des éléments constitutifs de la topographie de la région. Ces oueds sont des passages des habitants entre l’Est (vers la plaine) et l’Ouest (Vers le Dahar et le Sahara.

Les constituants et le caractère du sol diffèrent pour chaque sous unité géographique. On trouve essentiellement des dépôts sableux et limoneux quaternaires surmontant une couche d’argile le long de la plaine de Djeffara5, tandis que la chaîne de Dahar est constituée par des formations plus anciennes notamment du permien au tertiaire, des accumulations de limons lœssique et du calcaire et du marne6.

      1.1.3. Caractéristiques du climat

Cette région du Dahar, équipée par la chaîne des Matmata, peuplée depuis la période préhistorique est dotée d’un emplacement qui sépare littéralement la mer et le désert. Cet emplacement à proximité de la mer avec une altitude importante, favorise un climat présaharien tempéré avec des précipitations très faibles et irrégulières qui dépassent rarement 200 mm/an. Ces données ont favorisé le peuplement et l’aménagent des vallées et des terres agricoles dans cette façade en face du golfe de Gabès. La température peut atteindre un maximum de 50°C pendant le mois le plus chaud et un minimum entre 5°C et 0°C pendant le mois le plus froid. Cette température n’a pas empêché les habitants à s’installer. Le climat est l’un des facteurs qui ont encouragé les habitants à développer un habitat troglodytique en s’adaptant avec le contraste de la température.

      1.1.4. Richesses naturellese

La richesse des ressources naturelles sont parmi les facteurs les plus importants qui ont incité à choisir le site convenable pour l’installation d’un groupe humain. Les ressources en eau, la qualité des terres dans les vallées ainsi que la couverture végétale sont des éléments déterminants pour une implantation continue et permanente dans cette partie de la montagne. Rappelons que le village de Toujane est peuplé jusqu’à nos jours malgré les flux d’exode et de migration vers le village de D’khilet Toujane crée au début du dernier quart du XXe siècle, aussi vers Mareth et les grandes villes. Cette migration qui a commencé depuis les débuts du XXe siècle est encouragée par plusieurs facteurs climatiques, économiques et sociales7. Quelques familles continuent encore à vivre à Toujane selon un mode de vie traditionnel des montagnards fondé économiquement sur une arboriculture dans les aménagements hydro-agricoles, surtout l’olivier, le figuier et des palmiers. Les habitants pratiquent aussi quelques labours dans les jessour essentiellement de l’orge et l’élevage des troupeaux de chèvres et de moutons8. Elles exploitent aussi des ressources naturelles locales comme l’Alfa qui sert à la fabrication de sparterie notamment le Kambout ou Rouniya9. Ces grands contenants à grains servent pour le stockage du blé et de l’orge ainsi que et les scourtins pour les huileries traditionnelles. Les habitants de Toujane, comme tous les Djebalia du Dahar, pratiquent généralement la culture dans les jessours, de différents tailles, aménagés dans des vallées. Ce système ancestral permet la retenue des eaux de ruissellement. La région doit son essor, sa richesse ainsi que son autonomie économique entre autres à ce système de jessour10.

Parmi tous les villages du mont des Matmata, Toujane a été bien gâté par plusieurs sources d’eaux jaillissant d’une nappe phréatique superficielle piégée dans la montagne. Le village compte en totalité six sources d’eaux mais seulement deux qui sont encore en utilisation. On note également, comme moyen d’adaptation à la sécheresse de la région, la présence des majels et des Fesguias dans la plupart des maisons du village.

1.2. Données historiques

      1.2.1. Historique de la région

Le site de Toujane comporte l’une des rares traces de l’occupation préhistorique dans la région. En amont de la vallée d’oued Toujène et au niveau des hauteurs de la gorge qu’il a ouverte, un site préhistorique peut être identifié. Bien que mêlé aux remblais issus d’un aménagement de Jessour, les éléments d’une escargotière sont reconnaissables. Il s’agit de masse de terre de couleur noirâtre englobant pierres brûlées, restes d’escargots, pièces en silex taillé. Il y a quelques milliers d’années, l’Homme préhistorique a choisi cet endroit pour s’installer. Il a profité de cette "vue en cachette" qui donne sur la vallée et les ources d’eau douce attirant les gibiers. Il a profité aussi de la proximité du site de la source de la matière première qu’il utilise pour tailler ses outils en l’occurrence le silex contenu dans la couche dolomitique formant le sommet de l’escarpement qui domine le village11.

Fig. 2. Au premier plan les traces d’une Ramadia à Toujane.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

Dans la région des montagnes du Sud-Est tunisien, la reconnaissance des modes d’occupation du sol durant la période préromaine semble difficile en raison du manque des programmes de recherches sur terrain et surtout l’occupation permanentes des lieux. Pour des raisons historiques, les investigations archéologiques autour de l’occupation du sol dans les zones montagnardes de la chaîne Matmata-Dahar ont souvent focalisé l’intérêt sur les aspects culturels de la civilisation romaine. Une catégorie importante d’établissements de l’Homme protohistorique, Arjem, comparables dans leur implantation, leur organisation et leur mode de construction à celles répertoriées dans d’autres régions notamment la région sud de Douz12 sont encore visibles sur le terrain13. Ces constructions témoignent d’une présence (les Hommes et leurs traditions) qui s’est poursuivi avec les tribus nord africaines qui ont occupé cet espace en créant un modèle qui se répond largement durant l’histoire de cette large zone allant de Djebel Naffoussa au sud jusqu’à Djebel Matmata.

L’histoire de la conquête des régions montagnardes et les modalités de leurs intégrations dans les terres conquises par les romains dans cette zone de frontières sont documentées par Pol Trousset dans son ouvrage sur le Limes Tripolitanus14. Plusieurs vestiges archéologiques remontant à cette période sont encore visibles sur le terrain non loin de Toujène15 à Kef Ennsoura et Henchir Guéciret16. Dans le site de Toujane, la continuité de l’occupation humaine et l’extension du village nous empêchent de distinguer les vestiges qui remontent aux périodes anciennes. On peut en particulier citer quelques vestiges qui restent énigmes et difficiles à identifier dans les alentours immédiats du village. S’agit-il des ruines de l’occupation des tribus qui ont occupé le milieu depuis la protohistoire et qui ont peuplé cette montagne durant son histoire ?

Fig. 3. Vue d’une partie du site Henchir El-Gueciret dans le village de Ladbache à Djebel Matmata.
Fig. 4. Monuments énigme à Tkhachkhoucht à l’Est du village.

Durant l’antiquité tardive et jusqu’à l’arrivée des arabes au VIIe siècle17, tout le territoire de la montagne a connu une mise en place d’un habitat regroupé, dense et suivant un modèle qui se répand largement depuis la période islamique précoce. Cette vaste zone apparait comme un ensemble homogène sur le plan paysage, milieu naturel et ressources ainsi que sur le côté humain et culture matérielle. Certains villages comme Toujane s'y sont formés tout au long, ils étaient protégés par le relief, témoignant d’une originalité sur le plan de son organisation et de son architecture. Le cadre naturel hostile a obligé les habitants à s'y adapter avec un mode de vie particulier, en créant des techniques architecturales spécifiques.

      1.2.1. Historique de la région

Nous disposons de très peu de sources écrites qui ont mentionné les origines des habitants de Toujane, alors et à l'aide des enquêtes auprès des vieillards du village, on a retenu plusieurs versions que nous pouvons résumer de la manière suivante :

    1. La partie sud du village appelée Le Fesil est constitué de plusieurs fractions de tribus ou familles de différentes origines, les plus anciennes sont celles de "Ouled Hassen" (venus de Maroc), et "Ouled Mhelhel" (de Tripoli), et "Elkalayine" (les anciens habitants du ksar et vraisemblablement les plus anciens).

    2. La Taîcha, la partie Nord du village est constituée essentiellement des fractions de "Ouled ben Dada", "Ouled Helel", "El Hamaza".

Vers la fin du XIXe siècle, l’ouvrage intitulé Nomenclature et répartition des tribus de la Tunisie, nous donne un tableau sur les habitants du village de Toujane (Toudjan) et de sa région : « les Ouled ben Dada. Cette fraction est divisée en sous fractions suivantes : Oulad ben Dada, Oulad Mhamed, Ouled Saadallah, El R’arka, El Braouka, El Haddada, Oulad Hassen, Oulad Mhalhel ». Ils sont répartis sur les endroits suivants : « Ettaîcha, El Braouka, Oulad Bach (Ladbèche), Djefara, Toudjan, Et’T’abcha, Afçil (El-Fsil), Q’djili »18.

Selon d’autres témoignages sur le village19 et sur l’origine de la population de Matmata, Toujane était habité par des populations d’origine berbère qui, « émigrèrent un jour en masse dans le nord de la Tunisie et fondèrent « Moknine » et Kalaâ Kbira » dans le sahel de Sousse. On suppose qu’ils prirent cette résolution à la suite d’une sècheresse persistante qui désola le sud tunisien, ou à cause de l’état de guerre dans lequel vivaient continuellement les tribus du sud »20. Après le départ des anciens habitants berbères de ce village et « Peu après arriva un groupe de gens venant de « Saniat-El-Homra », tribu des Oulad-ben-Tsabel, près de Tripoli. Ayant trouvé le village de Toujane abandonné, quelques rares anciens habitants y tant seuls restés, ils s’y installèrent »21. Dans ce genre de récit, qui s’appuyaient sur la mémoire des gens, les datations restent toujours approximatives. « Il y’a plus de quatre cents ans de cela, disent les gens de cette sous-fraction ». « Leur souvenance est aussi confuse sur la date réelle de leur arrivée que des incidents qui marquèrent leur installation dans leur nouvelle résidence ». Si l’auteur a récolté les informations dans le village dès l’installation du protectorat dans le territoire militaire du sud c.à.d. vers la fin du XIXe siècle, cette histoire de migration vers le Sahel tunisien et la fondation des villages aurait lieu vers le XVe siècle qui correspond avec l’époque des Hafsides en Ifriqiya. Cette date est très plausible et correspond à une époque où le déficit démographique du nord de l’Ifriqiya et du sahel a été, toujours et notamment à l’époque islamique moyenne qui a connu des disettes et des épidémies, comblé par des flux des fractions de tribus berbères venant de Djebel Matmata et de Naffoussa en Libye. Selon le même auteur de ce rapport-article, cette sous-fraction qui a peuplé de nouveau le village de Toujane, « s’est subdivisée elle-même en plusieurs famille qui sont : les Oulad-Djamain22 et les Oulad Hassen, qui habitent le quartier Afçil, et les Oulad-ben-dada qui habitent le quartier Taîcha »23, il ajoute que ces deux familles étaient autrefois ennemies.

Comme toutes les régions du Djebel Matmata-Demmer, Toujane va attirer d’autres familles et sous-fractions, venant de Djebel Naffoussa ; « Arriva ensuite une famille des Oulad Mhelhel qui venait d’El-Haraba, près de Nalout, habitant aujourd’hui Afçil, et une famille des Oulad-Saad-Allah il y’a deux siècles et demi. Ces derniers furent bien accueillis par les Oulad-ben- Tsalet, qui n’étaient comme eux que des usurpateurs. Un groupe des Saad-Allah se sépara plus tard de cette famille et émigra à Elhaffay24 ; les Saad-Allah ont conservé d’étroites relations avec les Ouderna et se considèrent toujours comme appartenant à cette tribu, qui envoie faire des ziaras chez eux ». Le rattachement administratif de ce village de Toujane au caïdat de Matmata remonte à l’année 1880. Avant cette date, les habitants de Toujane payaient leurs impôts au caïdat de Médenine et leurs échanges commerciaux se faisaient avec cette ville25.

Grâce aux nombreuses missions sur le terrain durant les deux dernières décennies, notre connaissance du terrain nous a permis d’identifier plusieurs établissements sur la ligne de crête longeant la cuesta allant de Toujène, en passant par Kherbet Bou-Rkiz, Kherbet EL-Youdi26, Kherbet Ed-Dir, les ruines de Kef En-Nsoura, Kherbet Tatoutcha, Kherbet El-Guessir jusqu’à Chéguimè permettant ainsi de contrôler toute la plaine de Djeffara, représentent vraisemblablement des établissements des anciennes fractions de tribus qui ont occupé cette partie sud du Dahar septentrional même avant la présence romaine dans la région. Cette partie de la montagne qui commence d’En-Nagueb et Moggor au sud jusqu’au nord de Djebel Matmata a été plusieurs fois la cible des expéditions militaires notamment de Sharf-Ad-din Quaraqush27. Ces forteresses déjà mentionnées, s’ajoutent à la série de Galaâ dans la montagne de Matmata touchées par les campagnes de Quaraqush à partir de 576 H / 1181 ap. J.C. et mentionnées par le texte de Ibn Shahinshah Al-Ayyubi28. L’existence d’une fraction de Ouled Hassen à Toujane et précisément dans sa partie Sud El-Fsil, peut être une piste de recherche pour l’identification de Galaât Hassen mentionné par Ibn Shahinshah et conquise par Quaraqush.

Fig. 5. Sommet de Kef En-Nsoura culminant de 713 m d’altitude.
Source : Photo Nouri Boukhchim.
Fig. 6. Alignement de sites sur la cuesta de Toujane : Kherbet Bou-Rkiz, Kherbet El-Youdi et Kef En-Nsoura<
Source : Photo Nouri Boukhchim.
Fig. 7. Série de sites vers l’Ouest de Kef En-Nsoura.

1.3. Les ressources économiques de la région

      1.3.1. Le Mode de vie des « Toujanais »

En plus des activités des femmes dans les maisons et des hommes dans le village lui-même (artisanat, construction des maisons, travail dans les huileries, le rythme de la vie quotidienne des montagnards est partagé entre la pâture des troupeaux, les labours pendant les saisons de la semence et le labour des jessours après la cueillette, la récolte des céréales au début de l’été et des fruits de ses vergers (figues, amandes, dattes etc). Il y a en fait, trois secteurs/zones de travail ; les vergers dans les alentours immédiats du ksar là où on trouve les lieux habités (ksar, village, balad, rabadh), les terres dans la plaine et les parcours dans les vallées et les cuvettes et finalement les terres dans la plaine de Djeffara. Les habitants de Toujane, comme tous les habitants du mont de Matmata ont adapté leur mode de vie ainsi que leurs habitations, selon un rythme particulier profitant de la variété des ressources naturelles, relief et climat et terrain.

Fig. 8. Schéma approximatif du modèle de l’occupation du lieu.
Réalisation : Asma Sekmani.

      1.3.2. Le Mode de production

L’économie de Toujane a été modelée principalement par le mode de vie de ses habitants et son environnement varié (montagne, plaine, Dahar), on a tiré deux secteurs principaux :

                a. L'agriculture

L’ensemble du village vivait de l’agriculture et de l’élevage : la culture des Jessour constituée d’une variété d’arbres (palmier, figuier, Olivier...), les semailles des céréales partiellement dans les Jessour mais surtout dans les plaines de Djeffara, et le pâturage des troupeaux sur le plateau de Dahar.

Fig. 9. Un Jesser (Sounef) pour cultiver des palmiers à Toujane.
Cliché : Asma Sekmani.

                b. L'artisanat

Parmi les activités très connues dans les villages de montagne, et particulièrement dans le trio Toujane, Zmertène et Tounine, c’est le tissage. Une activité féminine caractérisée par la variété des couleurs et des motifs symboliques de la région. Les femmes pratiquent cette activité depuis des décennies, elle sert à produire des objets personnels pour le foyer mais elle présente essentiellement une source d’argent. On peut citer plusieurs types de tissage dans ces villages : le Margoum, le Klim, le Bakhnoug, les Sacs, le Barnous, les Kachabia etc. A côté du tissage pratiqué par les femmes, on trouve le métier de l’alfa pratiqué par les hommes pour couvrir ses besoins en objets d’agriculture comme : les cordes, les couffins, les paniers, les Sacs de réserves.

2. Spécificités et évolution d’un modèle d’urbanisme montagnard à Toujane

Fig. 10. Vue générale de Toujane.
Cliché : Asma SEKMANI.

2.1. Symbiose entre un paysage naturel et le savoir-faire humain

      2.1.1. Intégration Paysagère

Dans son fameux ouvrage sur le monde des ksour et de villages de crêtes, André Louis écrit « Où commence le village où finit la montagne ? Comment distinguer celle-ci de celui-là, quand des siècles durant, le rude combat à l’homme et son dialogue parfois, avec la substance minérale à tailler ce paysage dantesque »29. Presque systématiquement construit sur la pente Est de la montagne, le village s’intègre parfaitement avec le paysage naturel. Il est très difficile de dissocier le relief de la montagne et l’ensemble des constructions avec leurs aspect compact et dense. Le village reprend les courbes des niveaux et l’allure du massif, et se produit suivant des paliers en gradins pour accentuer la continuité avec le paysage. Les matériaux utilisés se confondent avec la nature et le tout s’aperçoit comme une sculpture. La couleur fauve des rochers s’intègre avec la couleur ocre des pierres dans les constructions. Une telle intégration donne l’image d’une fortification permettant de contrôler les vallées discrètement.

Fig. 11. Vue générale de Essafha.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM

      2.1.2. Implantation du village dans le Milieu Naturel

Comme tous les autres villages perchés du Sud tunisien, Toujane affirme la délicatesse et le soin des montagnards à la recherche d’un site d’implantation convenable. Cette recherche se base sur plusieurs paramètres :

                a. Le souci de sécurité

Cette population occupait pendant des siècles les sommets des montagnes où on ne peut pas révéler les secrets de leurs lieux d’habitat (Galaâ قلعة, Gasrقصر , Balad بلد ,Qarya قرية). Cette position stratégique défensive, choisie par les montagnards dans la plupart de leurs habitats au sud tunisien, notamment dans les deux parties de Toujane (Fsil et Taîcha qui disposent chacune d’une citadelle) offre la possibilité de contrôler toute la plaine de Djeffara jusqu’à la mer et permettant, par conséquent, de repérer tout danger éventuel et même de faire face aux facteurs naturels.

Fig. 12. Vue générale des deux forteresses et de la vallée d’Oued Toujane.
Cliché : Nouri Boukhchim.
Fig. 13. Vue générale de la forteresse de Taîcha.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.
Fig. 14. Vue de la façade Ouest de la forteresse de Taîcha.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

Ces constructions témoignent aussi, outre la mise en place d’un lieu de refuge, d’un système économique et un mode de vie basé sur l’emmagasinement et le stockage pour les habitants. Un modèle de Ksar-grenier collectif qui se répand largement dans l’espace du Maghreb depuis la période islamique précoce ou même avant la présence islamique en Afrique du Nord. Même si on ne dispose pas de traces écrites tangible sur un rôle joué par les deux éléments défensifs et de contrôle mentionné à Toujane, les recoupements des récits du texte de Ibn Shahinshah et l’enquête sur le terrain peuvent nous amener à des hypothèses qui restent plausibles.

               b. Une parfaite adaptation avec les conditions climatiques

Dans le cas de ces villages montagneux l’orientation est dictée par la topographie du terrain. On trouve dans la plupart de ces groupements sur les escarpements rocheux orientés vers l’Est et qui reçoivent le vent du nord et de l’Est, comme à Toujane, Béni Zalten, Mzata, une disposition permettant aux constructions de profiter le maximum d’un climat tempéré venant de la mer du golf du Gabes. Par l’orientation vers l’Est, les habitants se protègent aussi contre la rigueur du climat saharien venant de l’Ouest.

               c. Exploitation des sources d'eaux

Même si les sources d’eau naturelles n’étaient pas toujours présentes dans tous les villages perchés du Sud tunisien, Il est indéniable que l’eau était un élément indispensable pour l’installation des groupes humains. La recherche d’eau a toujours été une préoccupation constante. Le village de Toujane compte six sources d’eaux relativement sur la même altitude, et pour les protéger, le village est implanté en avant afin d’assurer leur surveillance. « En restant sur un site défensif, on vient se mettre à la même altitude que celle des sources et des puits : l’avantage était donc appréciable, même s’il fallait aller chercher l’eau à quelque 500 mètres, mais par un chemin relativement horizontal »30.

Fig. 15. Les sources d’eau de Toujane.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

2.2. L’organisation spatiale

L’urbanisme reflète souvent l’identité culturelle collective, le mode de vie ainsi que le système économique de chaque groupement humain ou chaque communauté. Par une organisation spatiale spécifique, le village de Toujane, lui-aussi répond à ces règles générales.

Toujane est un exemple concret d’un village qui conserve encore toutes ses caractéristiques où l’être humain vit en harmonie avec son environnement montagneux. Le milieu « urbain » est créé avec beaucoup de soin et savoir-faire accumulé depuis des siècles. On distingue sa particularité qui commence dès le sommet de la montagne puis se ramifie progressivement sur le flanc. D’après une lecture panoramique de l’ensemble du village, on remarque qu’il se divise en deux groupements, deux parties de même village ; celui de Fesil et celle de Taîcha, séparées par Oued Toujane.

Fig. 16. Composantes du Village : Fsil et Taîcha.
Réalisation : Asma SEKMANI.

      2.2.1. El-Fesil : الفصيل

Cette partie Sud dite El-fesil, est divisée elle-même en deux grandes zones : Elhaf et Essafha, situés de part et d’autre de la voie principale du village.

Fig. 17. Vue générale du village.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.
Fig. 18. Évolution de la partie Sud El Fsil : El-haf et Essafha.
Réalisation : Asma SEKMANI.

                a. El-haf الحاف (la partie supérieure) :

C’est l’ancien noyau du Fesil, situé au flanc de la montagne, plus proche du sommet (Galaâ), avec un relief en pente très accentuée, ce que nécessite la création de plusieurs plateformes très limitées en largeur. La plus ancienne plateforme se trouve en haut, une fois elle est complètement saturée, on descend vers la plateforme suivante. Cette partie se présente comme un ensemble de constructions accrochés à la montagne et organisés autour d’une mosquée, en suivant les courbes de niveaux et en se fondant avec le massif. La circulation se fait horizontalement et verticalement par des ruelles et des parcours piétons suivant le relief. Une voie principale (sentier) parait la plus importante, commence du cimetière vers l’Est, puis se ramifie au niveau du noyau de l’ensemble, pour aboutir enfin à la source d’eau « Charchara ».

                b. Essafha الصفحة(La partie inférieure) :

Elle est développée sur un terrain avec une pente douce, ce terrain servi auparavant de terre agricole pour les anciens habitants du village, d’où vient le nom de Essafha qui veut dire : un type de Jesser. Essafha constitue une extension plus récente d’Elhaf, avec un ensemble de constructions plus homogène et une structure urbaine plus hiérarchisée.

Cette partie est traversée par une voie secondaire parallèle à la route principale, permet l’accès aux différents quartiers, et qui donne naissance au plusieurs autres axes de circulation.

Fig. 19. Routes, voies et sentiers dans le village de Toujane.
Réalisation : Asma SEKMANI.

Cette partie se divise en 4 grandes zones ou ‘‘Jihats’’ qui veut dire quartier :

    1. Jihat Saâdallah à l’ouest divisée elle-même en trois petits quartiers entourant une placette centrale (Ouled Youssef, Ouled Yahia et Lebbarisse). جهة سعد الله.

    2. Jihat El- galâiyne القلعيين.

    3. Jihat Ej-Jemaâyine الجماعيين (avec El-galâiyne au centre).

    Jihat Ouled Mhalhel à l’Est où le tissu urbain devient moins dense.

Fig. 20. Vue générale de Essahfa.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

      2.2.2. Taîcha الطايشة

La partie Ouest dite Taîcha est constituée elle-même de deux parties homogènes. Comme dans le cas de Fesil, la route principale devise cette partie en deux ; la partie supérieure, la plus ancienne, abrite la majorité des constructions, alors que la partie inférieure n’a commencé de se développer qu’après l’implantation de l’école primaire par les colons et on peut remarquer actuellement qu’elle est encore moins dense que l’ancienne partie.

Fig. 21. Vue générale de Taîcha.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

      2.2.3. Voies de circulation et sentiers

Toutes les sous-unités du site, implantées sur les deux versants, se sont développées simultanément au fur et à mesure de l’installation des fractions des tribus, dans le milieu et surtout les tribus fondatrices du village depuis l’antiquité. Ces parties vont rapidement s’organiser en plusieurs quartiers reliés entre eux par des voies secondaires. S’adaptant avec la topographie du lieu, la spécificité du réseau de voies de circulation est bien remarquable dans le village, avec son tracé sinueux. Ils se caractérisent avec la largeur limitée et le jeu d’ombre et de lumière :

    1. La largeur des ruelles est généralement entre 2,5 et 3m afin de répondre aux besoins des habitants, notamment le passage des bêtes avec les bissacs et le filet rempli d’alfa et de paille. Ces ruelles restent utilisables jusqu’à nos jours et permettent encore le passage des véhicules.

    2. Le jeu d’ombre et de lumière est fourni par une alternance entre les parties couvertes et non couvertes et l’existence des étages dans les habitations bâties, ce qui permet de créer des zones de repos et de protection contre la chaleur et le vent.

A l’intérieur de chaque quartier, ou entre deux, on trouve une placette qui sert comme zone de circulation où se déroule les fêtes et les rencontres des villageois. Cette placette contient généralement une ‘‘Doukana’’ qui constitue un espace de rencontre pour les vieillards de village qui viennent surtout pour leur jeu préféré le ‘‘Karbga’’.

Fig. 22. Vue du village.
Cliché : Asma SEKMANI.

2.3. L’organisation urbaine

      2.3.1. L'évolution du village

S’agissant de l’occupation du milieu, les premiers fondateurs du Toujane ont choisi le flanc d’une montagne d’environ 550 m de hauteur, un terrain très accentué pour implanter un village. Cette création était programmée et encouragée par un site naturel stratégique très favorable pour l’implantation humaine et répond à beaucoup de critères. Au fils des années, le nombre des habitants a augmenté ainsi que le nombre de leurs constructions, ce sont des petits édifices, creusés et bâtis ayons suivi les courbes de niveaux du terrain, verticalement, du sommet aux pieds de la montagne, où la pente devient plus douce et le terrain s’aplatit. On distingue cinq étapes marquantes de cette évolution :

Étape 1 : Cette première étape est marquée par la construction de deux ksars / citadelles. Elle parait être la première étape de la création de Toujane, dès l’arrivée des montagnards dans ce site31 occupé depuis la préhistoire. Ils constituaient vraisemblablement le noyau d’origine, implantés au sommet de la montagne. Dans un premier temps, ces deux ksars-citadelles ont été conçus en tant que lieu de refuge contre les diverses conquêtes, de contrôle et un noyau relié certainement à des constructions et des habitations sur les mêmes lignes de crêtes et sur les versants32. Dans les différents cas que nous avons étudiés dans cette chaîne montagneuse33, la pièce maitresse de l’aménagement s’appuie sur un monument sur le sommet jouant le rôle défensif et de contrôle34.

S’agissant de l’occupation du milieu, les premiers fondateurs du Toujane ont choisi le flanc d’une montagne d’environ 550 m de hauteur, un terrain très accentué pour implanter un village. Cette création était programmée et encouragée par un site naturel stratégique très favorable pour l’implantation humaine et répond à beaucoup de critères. Au fils des années, le nombre des habitants a augmenté ainsi que le nombre de leurs constructions, ce sont des petits édifices, creusés et bâtis ayons suivi les courbes de niveaux du terrain, verticalement, du sommet aux pieds de la montagne, où la pente devient plus douce et le terrain s’aplatit. On distingue cinq étapes marquantes de cette évolution :

Étape 1 : Cette première étape est marquée par la construction de deux ksars / citadelles. Elle parait être la première étape de la création de Toujane, dès l’arrivée des montagnards dans ce site31 occupé depuis la préhistoire. Ils constituaient vraisemblablement le noyau d’origine, implantés au sommet de la montagne. Dans un premier temps, ces deux ksars-citadelles ont été conçus en tant que lieu de refuge contre les diverses conquêtes, de contrôle et un noyau relié certainement à des constructions et des habitations sur les mêmes lignes de crêtes et sur les versants32. Dans les différents cas que nous avons étudiés dans cette chaîne montagneuse33, la pièce maitresse de l’aménagement s’appuie sur un monument sur le sommet jouant le rôle défensif et de contrôle34.

Fig. 23. En rouge sur le sommet les deux forteresses (Galaâ).
Réalisation : Asma SEKMANI.

Étape 2 : Cette étape a débuté lorsque les occupants du lieu ont quitté le Ksar pour habiter dans des grottes et des constructions semi-enterrées, dans un niveau juste au-dessous du Ksar. Cette plateforme paraît être la plus ancienne, où on a trouvé les traces de l’ancienne mosquée du village, dite « mosquée El Haf ».

Fig. 24. La deuxième étape : El-Haf.
Réalisation : Asma SEKMANI.

Étape 3 : Cette étape correspond vraisemblablement à un village qui a commencé à apparaître et à évoluer en suivant les courbes de niveaux de la montagne, et en descendant d’une plateforme à une autre lorsque celle d’avant atteint la saturation. Jusqu’à cette étape le village prenait la disposition du gradin.

Fig.25. Photo générale des composantes du village de Toujane.
Source : Google Earth.
Fig.26. Évolution de l’urbanisme sur « El-Haf » dans les deux parties du village.
Réalisation : Asma SEKMANI.

Étape 4 : C’était lorsque les constructions ont atteint le niveau d’Es-Safha, qui ne sert plus de terre agricole, caractérisée par une topographie beaucoup moins accentuée. On n’a plus besoin alors de suivre des plateformes avec des largeurs très limités. Cette étape est marquée par l’augmentation du nombre des habitations construites, un ensemble plus homogène, et par une structure urbaine plus hiérarchisée.

Fig.27. Extension du village vers Essafha.
Réalisation : Asma SEKMANI.

Étape 5 : Dans cette étape le village a continué de se développer vers l’Est en suivant la direction de la montagne, où on remarque le nombre important des habitations troglodytiques.

Fig. 28. Extension de l’urbanisme et saturation du lieu.
Réalisation : Asma SEKMANI.

Après cette série d’étapes, le village se trouve dans un état de stabilité, sans compter l’apparition de quelques nouvelles constructions qui viennent s’implanter au dépend des anciennes constructions délabrées.

      2.3.2. La centralité du village

La centralité était le principe d’organisation de l’espace des villages perchés. Les montagnards ont adopté le concept de la centralité sous plusieurs formes d’urbanisme ou d’architecture. Le ksar-grenier est conçu comme le centre et saisi comme élément constitutif et immuable de la structure urbaine de chaque village. La mosquée, mais aussi les placettes qui s’intercalent dans le tissu villageois, sont aussi des éléments centraux dans la perception de chaque unité ou sous-unité. Concernant le village de Toujane avec ses deux parties, une lecture de son organisation « urbaine » révèle une certaine convergence vers des éléments spécifiques du village, ces éléments constituent un axe d’équilibre pour chaque masse, un axe qui se développe autour de lui le reste du village. Ce principe de centralité se voit sur plusieurs échelles dans le village :

    1. Pour une échelle globale, le village pour chacune de ses deux parties, est développé autour de l’élément Ksar ou Galaâ, un élément implanté au sommet de la montagne, qui devient le centre radial dirigeant l’organisation de l’ensemble des constructions creusées et édifiées dans des niveaux inférieurs, tout en déterminant une certaine accessibilité et cheminement bien particuliers.

    2. À l’échelle du quartier : le principe de centralité est représenté par un système radioconcentrique composé d’un élément d’attraction à caractère religieux, les mosquées sont des points de convergence, autour desquels s’organisent les différentes composantes du village.

      2.3.3. Les points de repères

En regardant de loin l'ensemble du village qui s'immerge avec le paysage montagneux, on ne distingue que quelques éléments signalétiques, indissociable du reste du paysage. Ces éléments paraissent comme des tâches dans un environnement ocre, ils représentent les repères du village, et constitués principalement par les lieux de culte et l'école primaire nouvellement construite.

Fig. 29. Vue générale du village.
Cliché : Asma SEKMANI.
Fig. 30. Une Maison à Essafha.
Cliché : Asma SEKMANI.

3. Étude Architecturale

3.1. Les éléments constitutifs du village

La lecture générale de l’ensemble du village ne nous permet que de différencier les constructions accrochées à la montagne aux autres sur une terre aplatie. Mais en réalité, il y a beaucoup plus d’autres types de constructions (creusées/troglodytes horizontalement ou latéralement, semi-creusées, et construites avec la pierre locale), une variété qui dépend, visiblement, du relief et de climat ainsi que les choix des habitants.

D’après les observations de près de ces constructions, on constate que pour un seul type de ces habitations se trouve une variété d’usages. Ce village s’avère très riche, on ne s’arrête jamais de découvrir à chaque fois qu’on s’aventure un peu plus loin dans ses ruelles tortueuses, autour de ses diverses constructions.

Toujane, comme étant une entité homogène composée d’un ensemble de constructions de plusieurs types et usages, donne la possibilité de classer ces éléments constitutifs en 4 catégories :

      3.1.1. Le Ksar – Galaâ -Grenier Collectif : éléments de défense

Fig. 31. Vue de la forteresse de El-Fsil.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

Comme étant le noyau d’origine du village, le Ksar, une construction massive à caractère défensif, est implanté au sommet de la montagne et fusionné avec ses rochés. Il répondait au début à un besoin de sécurité comme point de contrôle et de refuge pour les habitants, puis au fils du temps s’est transformé en un espace à caractère agricole comme un grenier collectif. Le mode de vie des montagnards repose sur la transhumance saisonnière vers le Dahar et vers la plaine de Djeffara. Ce mode de vie nécessite le stockage des réserves de grains à l’abri d’un éventuel ennemi. Ces monuments érigés à Toujane (à El Fsil et à Taîcha) et sur les pitons ont joué plus qu’un rôle : une citadelle -refuge qu’on organise aussi en grenier collectif pour tous les habitants, nommé alors ksar ou GASR.

La position imposante de deux Ksars de Toujane, l’accès assez difficile en épousant parfaitement le relief et leur orientation vers l’extérieur (en comparaison avec les Ksour de plaines, orientés vers l’intérieur sur une cour) leur donnent un aspect défensif, symbolique et une valeur significative intense. Aujourd’hui, il ne reste plus grand chose de ces deux bâtiments de Toujane. En regardant de loin, il devient même très difficile de remarquer leur existence. Seulement quelques traces en ruine totalement dégradés et qui sont tellement informes qu’on ne peut pas imaginer si ces sites furent longtemps habités ou s’ils ne servaient que de refuges et des greniers. C’est depuis longtemps alors que ces constructions aient perdu leurs rôles référentiels.

Fig. 32. Façade Ouest de forteresse qui coiffe le sommet.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.
Fig. 33. Façade Sud, l’épaisseur du mur dépasse 1,50m.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.
Fig. 34. Mur Sud-Ouest épousant le relief de la montagne.
Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

      3.1.2. Les lieux de cultes : Mosquées Zaouias et Maqam

Dans le village, ces espaces religieux (mosquée, maquam, cimetière...) occupent une situation privilégiée ; ils marquent bien ses trois pôles mais aussi génèrent l'organisation de ses quartiers et placettes. Qu'ils se soient des espaces matériels bâtis ou non, ces lieux gardent toujours leurs importances formelles et fonctionnelles, leurs apparence architecturale et décorative parait très modeste, simple et sobre, mais au fond ils présentent un langage très riche en symboles et significations.

                a. Les mosquées

Le village de Toujane compte aujourd’hui trois mosquées encore en fonction et une ancienne mosquée en ruine, qu’on a trouvé ses traces sur une plateforme juste au-dessous du Ksar :

  • Mosquée El-Haf
  • Il paraît que c’est la mosquée la plus ancienne du village jusqu’à présent, elle a été remplacée par une autre mosquée édifiée en 1005 h dans un niveau inférieur appelée : « الجامع الأعظم ».

    La mosquée se trouvait en ruine et il ne reste de ses vestiges que le Mihrab et les traces des murs récemment restitué. Le plan de cet oratoire est presque carré avec quatre côtés qui mesurent 5m de l’extérieur, les angles sont tous arrondis « les angles sont souvent arrondis ‘‘par économie de matériaux’’ nous dit-on, mais effectivement c’est une technique architecturale qui donne aux constructions plus de solidité »35.

    Fig. 35. Ruines de la mosquée El-Haf : le mihrab est orienté vers l’Est.
    Cliché : Nouri BOUKHCHIM.
    Fig. 36. Plan de l’ancienne mosquée de El-haf.
    Dessin : Asma SEKMANI.

    La restitution de ce monument révèle l’emplacement possible de 4 poteaux dans la salle de prière et un mur de soutènement sur le côté adjacent au flanc du montagne. Le Mihrab, dans sa position actuelle qui supporte une légère inclinaison vers l’Est, nous fait penser aux Mihrabs des mosquées Ibadhites36 .

  • Mosquée Sidi Lakhar / Djamaâ Laâdham: (الجامع الأعظم)
  • Elle est connue aussi sous le nom de mosquée Elhaf, comme si elle remplace l’ancienne mosquée trouvée sur la plateforme juste au-dessus, elle est datée par une inscription qui indique l’année 1005h / 1596.

    Fig. 37. Djamaâ Laâdham.
    Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

    À côté de cette mosquée, on trouve une huilerie qui lui appartenait auparavant et qui a constitué une sorte de Habus pour couvrir les dépenses de la mosquée.

    Fig. 38. Vue générale de la salle de prière.
    Cliché : Nouri BOUKHCHIM.
    Fig. 39. Inscription mentionnant la date de fondation (1005 h /1596) et de la restauration (1335 h / 1916).
    Fig. 40. Plan de la mosquée Djamaâ Laâdham à Toujane.
    Dessin : Asma Sekmani.

  • Mosquée Es-Safha (Sidi Abderrahmen)
  • Fig. 41. Rue menant à la mosquée de Es-Safha.
    Cliché : Asma Sekmani.
    Fig. 42. Inscription datant la mosquée.
    Cliché : Nouri Boukhchim

    C’est la plus grande mosquée dans le village et la plus imposante, malgré son architecture simple et sobre, et sa couleur blanche repérable de loin. Elle est édifiée en 1903 d’après une inscription murale, à la place d’une ancienne petite mosquée, selon les récits des vieillards. Contrairement aux autres mosquées du village, la mosquée Essafha contient un minaret récemment construit.

    Le plan de la mosquée et son architecture sont très semblables aux autres mosquées du village ; elles sont composées d’une salle de prière, blanchie à la chaux, d’une forme rectangulaire parfois très proche du carré, divisée par des rangées de colonnes et des arcades en deux ou trois galeries parallèles au mur de Qibla et couvertes par une série de voûtes dans le même sens.

    Fig. 43. Plan de la salle de prière et Plan de masse de la mosquée de Essafha.
    Réalisation : Asma SEKMANI.

    Dans cette mosquée, comme les autres, la décoration est très timide avec un aspect massif et sobre. La cour ou « Sahn » servant pendant le beau temps d’extension à la salle de prière mais aussi d’un espace de discussion des sujets religieux. On y trouve généralement un « mejel » pour la collecte d’eaux pluviales. L’Espace d’ablution ou « midha » est généralement petit, couvert d’une voûte et détaché de la salle de prière.

  • Mosquée de Taîcha
  • C'est la seule mosquée édifiée dans la partie Nord de Toujane appelée Taîcha, d'où son appellation. Elle suit la même logique architecturale que les autres mosquées du village.

                    b. Les ''Maquams''

  • Maquam Sidi Abdelkader
  • C’est le maquam le plus proche des habitations situées dans un niveau inférieur de la rue principale, il est composé d’une pièce carrée surmontée d’une coupole et blanchie à la chaux, à côté de laquelle se trouve une autre pièce rectangulaire, accolée à un ‘‘Majel’’ et précédée d’une cour. L’ensemble est entouré par une clôture érigée en pierre sèche pour délimiter le haram de cet espace sacralisé.

    Fig. 44. Maquam de Sidi Ettaj.
    Cliché Asma Sekmani.
    Fig.45. Plan et coupe du Maquam de Sidi Abdelkader à Toujène.
    Réalisation : Asma SEKMANI.

  • Maquam Sidi Ettaj
  • Ce maquam est implanté au côté Sud-Est de l’oued, il est constitué en grande partie d’un Ghar غار (grotte) où se trouve le tombeau de Sidi Ettaj, ce ghar est creusé à côté d’une pièce carré surmontée d’une coupole et devant laquelle se trouve une petite placette pour le déroulement des cérémonies de ‘‘Ziara’’.

    Fig. 46. Vue générale : Façade des composantes de sidi Ettaj.

    On descend à la chambre funéraire par un escalier en pierre, la pièce est rectangulaire en profondeur, divisée en deux par une rangée de colonnes et des arcades, le mur à la direction du Kibla est équipé d’un Mihrab décoré par des inscriptions en formes géométriques et par de la peinture. La tombe se trouve juste au fond de la salle.

    Fig. 47. Intérieur du monument.
    Cliché : Asma Sekmani.
    Fig. 48. Plan et coupe de Sidi Ettaj.
    Réalisation : Asma SEKMANI.

  • Sidi Ben Yahmed
  • Se trouve du côté Nord-Ouest de l’Oued près de Taîcha, il est composé de même d’une simple pièce carrée surmontée d’une coupole.

                    c. Les cimetières

    Les cimetières de Toujane sont implantés à l’entrée de chaque partie du village, Fsil et Taîcha.

          3.1.3. Les huileries

    Fig. 49. Intérieur d'une huilerie traditionnelle.
    Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

    A Toujane, la production de l’huile d’olive est classée parmi les activités agricoles les plus dominantes au village. On compte aujourd’hui environ 25 huileries qui ne sont pas toutes fonctionnelles et dont la plupart d’entre elles sont complètement abandonnées. Côté architecture, ces huileries sont de plusieurs types : construite, creusée, ou semi-creusée.

    Malgré la diversité typologique de ces huileries, elles suivent toutes la même organisation spatiale, elles sont composées essentiellement de trois espaces : un air de broyage, un air de presse et un air de stockage en plus des espaces pour le stockage. Il est possible aussi de trouver plusieurs pressoirs dans une même huilerie ce que prouve l’importance de cette dernière et de l’activité de l’oléiculture.

  • Exemple d’une huilerie construite : Huilerie de Ouled Bourasse
  • Fig. 50 et 51. Huilerie Oulad Bourasse.
    Fig. 52. Plan et coupe d’huilerie Oulad Bourasse.
    Réalisation : Asma Sekmani.

  • Exemple d’une huilerie Semi-creusée : Ouled Yahia
  • Fig. 53 et 54. Plan et coupe de l’huilerie.
    Réalisation : Asma SEKMANI.

          3.1.4. Les habitations

    L’habitation qui constitue la partie majeure du village, présente à Toujane une grande richesse au niveau de l’architecture, des matériaux et des techniques. Ce mode d’occupation d’espace est le plus ancien dans l’histoire humaine, et passe par plusieurs étapes d’évolution à travers les siècles en obéissant chaque fois à des facteurs climatiques, topographiques, fonctionnels. On trouve à Toujane une variété typologique remarquable de l’habitation qui cherche à satisfaire des besoins spécifiques tels que : sécurité, protection, intimité, commodité, adaptation avec le mode de vie … etc.

    3.2. Typologie des habitations à Toujane

          3.2.1. Les grottes

    La grotte الغار est la forme la plus primitive de l’habitation qui remonte à l’époque préhistorique où l’homme se réfugie. Dans toute la chaîne des montagnes de Matmata à Naffoussa, les modes d’habitat typiquement local c’est un habitat troglodytique qui apparaît suivant des variétés. L’héritage géologique et les formes de la topographie et le savoir-faire des montagnards sont les facteurs qui sont derrière ce choix. A Toujane on trouve cette forme d’habitat creusé latéralement dans les binômes des roches notamment sur les plateformes les plus anciennes du village, au sommet de la montagne. Elles étaient sans doute les abris pour les premiers arrivés.

    Fig. 55. Plan du Ghar.
    Réalisation : Asma SEKMANI.
    Fig. 56. Entrée du Ghar

    Ces refuges sont arrangés peu à peu de façon qu’on puisse y demeurer, ce sont des cavités creusées dans les rochers sous forme des ghar en profondeur, on trouve généralement une niche au fond où poser les objets, parfois on trouve sur les parois intérieures le reste de la chaux servi comme un enduit. « Elles servirent en tout cas, assez longtemps, là d’occuper un sommet, on les quitte pour aller en occuper d’autres, ou parce qu’on y trouve plus en sureté »37.

          3.2.2. Les houchs semi-troglodytiques ou troglodytes latéraux

    On trouve ce type d’habitation généralement dans la partie ancienne du village qui se trouve au-dessus de la route principale, cette partie est développée en suivant les courbes des niveaux de la montagne avec une pente très accentuée.

    Sur des plateformes d’une largeur très limitées, ces habitations sont installées en piémont d’une excavation semi-troglodytique de la montagne et paraissent comme des petites constructions accrochées au Djebel.

  • Exemple : Houch Mohamed Ali Mabrouk (abandonné en 1980)
  • Fig. 57. Houch Mohamed Ali Mabrouk.

    Dans ces constructions on trouve un ou plusieurs éléments d’habitation appelés « Ghar », selon le nombre de la famille, ils sont excavés latéralement tandis que les autres espaces sont construits en avant, formant une cour centrale à ciel ouvert, un air pour les activités quotidiennes. Cette cour abrite souvent une étable et des greniers à grains.

    Fig. 58. Plan de la maison composite.
    Réalisation : Asma SEKMANI.

          3.2.3. Les Houchs Construits

    C’est un type d’habitation plus récent, implanté essentiellement dans la partie basse du village, où la pente devient plus douce. À ce niveau-là, on n’a pas besoin de creuser des ghars avec une terre relativement plate. Les pièces sont totalement construites autour d’un patio à ciel ouvert appelé "Ouest-Eddar" وسط الدّار , ou parfois organisées sur deux niveaux avec une cour en avant. Le tout est délimité par une clôture en pierre sèche d’une hauteur moyenne nommée صيرة.

  • Exemple 1 : Houch Ibrahim Mhalheli (abandonné en 1978)
  • Fig. 59. Photos du Houch.
    Cliché : Asma SEKMANI.
    Fig. 60 et 61. Plan et coupes de la maison de Mhelheli.
    Réalisation : Asma SEKMANI.

  • Exemple 2 : (Houch inconnu)
  • Fig. 62 et 63. Photos de la maison.
    Cliché : Asma SEKMANI.
    Fig. 64. Plan de la maison.
    Réalisation : Asma SEKMANI.

    Les différents composants de ce type d’habitation sont créés selon les besoins de la famille : un patio ou une cour discrète, où se déroule l’essentiel de la vie quotidienne, et sur laquelle s’ouvrent les autres pièces pour garder l’intimité de la famille. La cuisine ou la "Goussia" est généralement placée près de l’entrée avec des dimensions très limitées par rapport aux pièces d’habitation "dars". Selon les matériaux de construction, ces pièces prennent presque les mêmes dimensions en largeur de 2 à 3m (équivalent à la longueur des troncs d’oliviers et des troncs du palmier) mais des profondeurs variées vont jusqu’au 8 m. On trouve les mêmes dimensions aussi à l’étage en extension et on appelle ces pièces des "Ghofra".

          3.2.4. Les Houchs troglodytes verticaux-latéraux38

    Compte tenu de la qualité du sol et de la rareté et la faiblesse des couchs du Limon (Loess) dans le village, ce type d’habitation on le trouve essentiellement dans la cinquième et dernière étape d’évolution du village (la partie Est) où le terrain devient en pente légère et facile à creuser. Ce type d’habitation qui devient une spécificité de cette région de montagne a été créé en réponse aux conditions climatiques extrêmes du site, en recherche d’une meilleure adaptation au climat, au relief et à la vie quotidienne.

  • Exemple : Houch Ali Ben Bilgaçem (abandonné en 1975)
  • Fig. 65. Photos de la maison troglodytique en profondeur.
    Cliché : Nouri BOULHCHIM.
    Fig. 66. Plan et Coupe.
    Réalisation Asma SEKMANI.

          3.2.5. Techniques et matériaux de construction

                    a. Habitation troglodyte

                      a.1. Mise en œuvre

    Pour aboutir à une habitation troglodyte bien finie, on doit suivre une série des étapes successives. Une enquête orale a été menée dans le village afin de cerner les étapes de fondation d’une maison troglodyte en profondeur à Toujane et saisir les spécificités ou les particularités :

      1- choisir l’emplacement idéal avec une topographie et nature du sol convenables

    Fig. 67. Croquis Asma SEKMANI.

      2- Excaver un élément central sous forme d’un puits ( وسط الحوش أو المهراس ) avec un diamètre qui varie entre 4 à 5m et peut aller jusqu’à 10 m et une profondeur qui peut aller jusqu’au 8 à 10 m selon la nature de la couche de la croute et l’épaisseur du lœss.

    Fig. 68. Croquis Asma SEKMANI.

      3- Creuser la partie où on a choisi de placer l’entrée.

    Fig. 69. Croquis Asma SEKMANI.

      4- Lier l’entrée au puits creusée par un tunnel en pente douce, ce tunnel s’appelle "Sguifa" سقيفة.

    Fig. 70. Croquis Asma SEKMANI.

      5- Creuser les pièces de cette habitation latéralement sous forme des Ghars avec des profondeurs variées selon l’usage.

    Fig.71. Croquis Asma SEKMANI.

                      a.2. Typologie des Ghorfas

    Selon la fonction et l’usage, les pièces excavées, ou les ghorfas varient selon la forme et la surface et même en composition. D’après les visites de terrain dans les différentes maisons creusés à Toujane, on a tiré quelques exemples de pièces excavées :

  • Pièces d’habitation
  • Fig. 72. Croquis Asma SEKMANI

  • Pièces à usage de services :
  • Fig. 73. Croquis Asma SEKMANI.
    Fig. 74, 75 et 76. Détails des pièces excavées.

                      a.3. La cour

    C’est un élément central autour duquel s’organisent toutes les pièces creusées de l’habitation, un espace de vie et d’activités, il est également très nécessaire compte tenu de toutes ses différentes caractéristiques :

    Fig. 77. Croquis Asma SEKMANI.

      1. Une Forme cylindrique pour limiter le risque d’effondrement,

      2. La profondeur augmente la surface de l’ombre portée,

      3. Aération et éclairage des pièces creusées,

      4. Diminuer la température de l’air,

      5. Se protéger contre le vent et les courants d’air -Pour empêcher les boues et les eaux de ruissellement de s’accumuler, on trouve généralement soit une citerne soit une fosse remplie de sel au milieu de la cour.

                      a.4. Dispositif d'entrée

    Dans les habitations berbères, la notion d’intimité et la préservation de la vie privée est importante surtout au niveau de l’entrée qui constitue le point de contact avec l’extérieur, ce contact ne doit jamais être direct.

    Fig. 78. Croquis. Asma SEKMANI.

                    b. Habitation construite

                      b.1. Les éléments de support

    Vue la nature du sol rocheux à Toujane, on remarque l’absence des fondations, le poids et les forces de la construction sont supportés par les éléments de structures en élévation, soit par les murs en pierres, les poteaux, les arcades ou aussi par les différents types de toiture :

  • Les murs
  • Les murs porteurs sont généralement d’une grande épaisseur qui varie entre 0,5m allant jusqu’à 1m, ils sont composés par des pierres irrégulières posées par taille de plus grosse en bas au plus petite en haut, ces pierres sont liées par un mortier de chaux.

    Fig. 79. Croquis Asma SEKMANI.

  • Les poteaux
  • En se promenant dans le village on a remarqué que les poteaux sont très rarement utilisés, soit comme un élément de support soit pour la décoration.

    Fig. 80. Photos des arcades dans les monuments de Toujane.

  • Les arcades
  • Elles sont utilisées à Toujane non seulement comme étant un élément de structure, mais aussi un élément signalétique à l’extérieur dans les ruelles.

    Fig. 81 et 82. Photos des arcades dans les monuments de Toujane.

                      b.2. Les éléments de couverture

    Les éléments de couverture à Toujane sont divisés en trois types, les toitures plates, les toitures en voûte (très rarement en voûte croisée) et les coupoles.

  • Toiture plate
  • On utilise du bois dans ce type de toiture (bois de palmier/olivier), ce sont des troncs (Ouds عود أو صنور من جذع النخل) coupés en deux et juxtaposés les uns près des autres, puis on remplit les vides par des pierres plates et par la suite on ajoute une succession de couches de plâtre et de sable.

    Fig. 83. Toiture.
    Dessin : Asma SEKMANI.

    Puisque ce type de toiture est un peu coûteux à cause de l’utilisation de bois, les voûtes ont devenu l’élément de couverture le plus répandu dans la région.

  • Les voûtes
  • On a retenue deux méthodes de construction d'une voute qui permettent de conserver le bois utilisé:

    - 1er Méthode :

      1. Une fois les murs de soutènement ont été montés, on place entre eux des silos à grains en tresses d'Alfa, entassés les uns sur les autres

      2. On couvre l'ensemble par une natte d'Alfa ou en feuilles de palmier afin d'obtenir un aspect bombé.

      3. On étale une couche d'argile sur ce coffrage, sur laquelle on peut ajouter des empreintes décoratives (des lettres, traces des mains des pieds...)

      4. On coule une fine couche de gypse puis on ajoute des pierres liées par du mortier.

      5. Après le séchage, on enlève la natte pour monter les murs au-dessus de la voute. Les éléments décoratifs et les traces des mains et des pieds apparaissent alors inversés en relief.
    - 2ème Méthode :

    Après avoir monté les murs de soutènement à une hauteur d'environ deux mètres, on accroche un coffrage en bois qui prend la forme d'un demi-cylindre de la voûte, puis on le recouvre par une couche de plâtre à base du gypse mélangée avec de pailles Après un demi-séchage on pose une autre couche de pierres liées par du mortier d'une sorte à avoir une toiture plate en haut, puis pour finir on ajoute une dernière couche de chaux pour l'étanchéité.

    Fig. 84. Techniques des coupoles.
    Dessin : Asma SEKMANI.
    Fig. 85. Dessin : Asma SEKMANI.

          3.2.6. Détails architectoniques

    On a relevé plusieurs détails architectoniques dans les différents types de construction, ces détails sont classés en 4 catégories :

                    a. Les ouvertures

    Fig. 86. Façade d’une maison.
    Cliché : Asma SEKMANI.
    Fig. 87. Façade d’une maison troglodytique à Toujane.
    Dessin : Asma SEKMANI.

                    b. Les linteaux

    Ces sont les éléments de soutènement au niveau des ouvertures, on a retenue 5 types :

    Fig. 88. Les types des linteaux.
    Dessins : Asma SEKMANI.

                    c. Les escaliers

    Généralement l'escalier est dépendant de la forme de l'élément sur lequel il est inscrit, on a trouvé 3 types :

    Fig. 89. Exemples des escaliers.
    Dessins : Asma SEKMANI.

                    d. Systèmes hydrauliques

    Ce sont des diapositives pour collecter les eaux pluviales, on trouve :

  • Le Majel
  • Fig. 90. Majel.
    Dessin : Asma SEKMANI.
    Fig. 91 et 92. Un quartier industriel : des fours à plâtre.
    Cliché : Nouri BOUKHCHIM.
    Fig. 93. « Tkhackhouchet » : Un quartier à l’Est du village. On y trouve des fours à chaux et plâtre.
    Cliché : Nouri BOUKHCHIM.

    Conclusion

    En dépit de la rareté de la documentation et des difficultés relatives au travail du terrain, l’étude de ce village perché reste un travail difficile mais possible. Ce papier mérite sans aucun doute d’être approfondi car ce n’est qu’un début d’un travail exhaustif qui traite ce village dans tous ses aspects, son historique et sa culture matérielle et immatérielle. Dans cette conclusion, il importe de signaler, qu’en absence des fouilles archéologiques, plusieurs questions restent énigmes et nécessitent une approche dans la longue durée de l’occupation de l’espace dans ce village et sa région. Plusieurs structures dans ce village souvent les moins conservées et réemployées, notamment les forteresses et quelques monuments dans le village, pouvaient appartenir à des phases anciennes de l’occupation de cette montagne.

    La découverte de quelques sites remontant à la période préhistorique, à l’époque romaine ou à l’antiquité tardive représente un indice parmi d’autres sur l’importance de cette région et l’ancienneté de l’occupation humaine. De part de son position stratégique, les montagnes de la Tunisie du sud, ont joué un rôle important durant les évènements la période islamique. Ils détiennent plusieurs éléments spécifiques : un paysage d’un plateau marqué par l’alternance entre les buttes, les vallées, les oueds ce qui a profondément influencé l’organisation du territoire et l’urbanisme conçu presque systématiquement sur les pentes. Un peuplement hétérogène et une mobilité permanant des Hommes dans un espace peuplé par des tribus depuis l’antiquité, et une architecture locale riche.

    Notes

    1 Les recherches menant aux présents résultats ont bénéficié d'un soutien financier du Programme Directeurs d’Études Associés DEA de la Fondation Maison des sciences de l'homme. The research leading to these results has received funding from the « Programme Directeurs d’Études Associés DEA » programme of the Fondation Maison des sciences de l'Homme.
    2 Abdellatif M’rabet, 1997. Voir aussi les résultats des travaux de la carte archéologique de Gabès, Kattana et Mareth élaborées par A. M’rabet.
    3 Administrativement ce village fait partie du gouvernorat de Gabes et de la délégation de Mareth, il est situé à 27 km à Est de Matmata, à 27 km Sud-Ouest de Mareth et à 30 km Ouest de Médenine.
    4 Pour plus de détails sur le milieu naturel de cette partie de la chaîne Matmata-Dahar, voir, Ben Fraj et al., 2019.
    5 Tarek Ben Fraj, 2012.
    6 Tarek Ben Fraj et al, 2019.
    7 Les chiffres des recensements montrent bien que la population et le nombre de demeures dans ce village perché ont beaucoup changé au cours des quatre dernières décennies : En 1975 on compte 6821 habitants soit 3279 hommes et 3542 femmes et 1579 logements. En 1984 la population de Toujane compte 4310 habitants soit 2153 hommes et 2157 femmes. Le nombre des habitations a diminué à 839 logements. Les chiffres du récemment de l’année 1994 montrent que la population de ce village a nettement diminué soit seulement 919 habitants répartie entre 428 hommes et 491 femmes. Le nombre des habitations a aussi diminué à 297 logements. Le nombre d’habitants dans le village de Toujane a considérablement diminué entre 1984 et 1994. On remarque d’après les chiffres qu’au cours de cette période Toujane a perdu plus que la moitié de sa population. La création du village de Dkhilet Toujane dans la plaine a attiré une bonne partie des habitants du village de montagne. En 2004 le nombre total des habitants qui occupent ce village est de 687 habitants répartis entre 323 hommes et 364 femmes occupants 276 maisons. Une certaine stabilité est marquée dans le recensement de l’année 2014. Le nombre des habitants 625 habitants répartis entre 302 hommes et 323 femmes occupent 380 maisons est due à de multiples facteurs. Une certaine dynamique économique (le tourisme, l’agriculture, le regain d’intérêt pour l’artisanat locale comme le fameux margoum de Toujène-Zmertène) a encouragé quelques familles à rester et s’investir dans les jessour et les maisons troglodytes. De point de vue genre, le nombre des femmes qui continuent à vivre dans le village perché de Toujène l’emporte toujours face à celui des hommes. Cela est dû à une migration masculine en premier lieu. Dans les villages perchés la femme s’occupe d’une grande partie de l’économie locale (garder les troupeaux, s’occuper des champs et le ramassage des olives, travail de l’artisanat etc). S’agissant du nombre des logements on remarque qu’il a chuté entre 1975 et 2004. Cette chute est bien remarquable sur le terrain à travers le nombre important des Houchs en ruine abandonnés depuis quelques décennies.
    8 Hédi Ben Ouezdou et al, 2016.
    9 Les escarpements rocheux dominant le village de Toujane accueillent quelques espèces végétales méditerranéennes ayant un aspect arborescent comme l’olivier sauvage (Zabbouz, Olea europea), le caroubier (Kharroub, Ceratonia siliqua), l’Alfa, El Guéddim, Araâr. Voir Ben Ouezdou et al, 2016.
    10 L’économie locale des habitants de Toujane se base aussi sur un élevage des animaux qui s’adaptent avec cette région caractérisée par la sècheresse périodique, les ressources limités et le terrain accidenté et difficile. Il s’agit des chèvres et des ovins, on trouve aussi en second lieu, le mulet et le dromadaire, exploités essentiellement dans l’agriculture et le transport.
    11 Les points de flèches et les outils de silex taillés sont omniprésents dans la région de Toujane jusqu’à Zmertène.
    12 Ghaki M. et Paris F., 2013 ; Di Lernia et al, 2017 ; Lucci E. et al., 2019.
    13 Dans les alentours de Toujène, nous avons repéré quelques tas de pierres qui semblent être des tumulus.
    14 Trousset P., 1974.
    15 Il s’agit vraisemblablement des monuments funéraires des traditions protohistoriques ? des tas de pierres qui rassemblement à des Tumulus.
    16 Trousset P., 1974.
    17 Ben Fraj et al., 2019.
    18 Protectorat français, Secrétaire Générale du Gouvernement Tunisien, Nomenclature et répartition des tribus de Tunisie, 1900, p. 234.
    19 « Toujane : le chemin pour arriver à ce groupe de villages, est d’un accès difficile, que l’on se rende a Afsil et Taicha. C'est par erreur que la carte ne porte pas le nom de Toujane (le Ksar qu'elle mentionne sous ce nom n'existe pas). Celui de « Ksar-el-Kef », qui y est inscrit, est le nom d'un ksar en ruines qui domine Taïcha et dont il porte en réalité le nom. Quant au « Kcar-Oulad-Saad-Allah » (et non Soud-Allah) il domine Asfll et porte le nom d'une des fractions de ce village. Il est en ruines. Ces deux villages sont séparés par un ravin très escarpé rempli de caroubiers. Au fond, serpente un filet d'eau provenant de six sources. Accrochés chacun à un des flancs du ravin, et dominés chacun par un rocher couronné d'un ksar, ces villages semblent se défier mutuellement et paraissent dire au voyageur : on ne passe pas ! Des six sources, deux sourdent de la montagne dans un ravin qui contourne le ksar d'Asfll à l'ouest, et autres, ombragées de caroubiers, s'échappent des flancs du versant méridional du ravin où passe la route qui conduit à Zeriba, Techin et Tamezret ». Le Compte Du Paty De Clam, Excursions chez les Matmata, Société de Géographie de Toulouse, n° 9 et 10, 1892, pp. 360-361.
    20 Menouillard H., 1912, pp. 30-31.
    21 Ibidem.
    22 Jemaiîne est actuellement une petite localité qui fait partie de Dekhilet Toujène, située à quelques kilomètres vers le sud.
    23 Menouillard H., 1912, p. 31.
    24 Bir-El-Hfay est actuellement une ville qui se situe à une trentaine de kilomètre au sud de la ville de sidi Bouzid, sur la route nationale reliant Kairouan à Gafsa.
    25 Menouillard H., 1912, p. 31.
    26 Chez les habitants de la région il s’agit de Kherbet El-Yhoudi : Le juif ?
    27 Ibn Shahinshah Al-Ayyubi, 2005.
    28 Ibn Shahinshah Al-Ayyubi, 2005.
    29 André Louis, 1975.
    30 Gérard Prost, 1954, « Habitat et habitation chez les Ouderna et les Matmata », Les Cahiers de Tunisie, T. II, p. 243.
    31 Tous les sites similaires comme Matmata, Zegrarine, Qalâat Mira etc, partagent d’abord le choix du site naturel sur le plateau un processus d’implantation qui ont conditionné l’organisation des constructions sur le sommet et en terrasses. N. Boukhchim, 2019.
    32 Même si la superficie sur la ligne de crète ne permet qu’une construction à caractère défensif, on suppose que cette étape doit être reliée à des petites agglomérations où des habitations troglodytiques ou des constructions.
    33 Nouri Boukhchim, 2019.
    34 P. Trousset, 1974. A. Louis, 1975. N. Boukhchim, 2019.
    35 André Louis et Ira Stanley Hallet, « Evolution d’un habitat, le monde berbère de Sud Tunisien », p. 102.
    36 Riadh M’rabet, 2009, p. 137-156.
    37 André Louis et Ira Stanley Hallet, p.107.
    38 Boukhchim N. et al., 2018.

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    PROST Gérard, 1954, « Habitat et habitation chez les Ouderna et les Matmata », in Cahiers de Tunisie 2, pp.239-254.

    Auteur

    Nouri Boukhchim

    Enseignant-chercheur, Université de Tunis : Institut Préparatoire aux Études Littéraires et Sciences Humaines (EPELSHT), Membre du Laboratoire « Monde Arabo-Islamique Médiéval » (MAIM) LR99ES01 : boukhchim.nouri@gmail.com

    Asma Sekmani

    Architecte, chercheure en sciences du patrimoine, membre du Laboratoire Monde Arabo-Islamique Médiéval (MAIM) LR99ES01 : sekmaniasma@hotmail.fr

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