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01 | 2016

Sousse, le tracé de l’avenue de la Quarantaine : genèse et construction de la ville neuve (1884-1904)

Leïla Ammar

Résumé

Les villes de la régence de Tunis ont connu, dans la seconde moitié du XIXème siècle, des transformations notoires liées aux grands bouleversements qui s’exercent en Méditerranée et à la nouvelle vision de l’espace urbain portée par les empires coloniaux. Ces transformations ont bien souvent été initiées en amont de la domination coloniale. Sousse, ville du Sahel Tunisien, siège d’un caïdat et place forte militaire de 1881 jusqu’en 1922 est également le lieu de ces confrontations politiques, urbaines et architecturales, objet de notre investigation ici, dans les deux premières décennies de la formation et de la construction de la ville neuve. Comment a été mise en place la ville neuve à Sousse, avec quelles difficultés et selon quelles problématiques ? Quel a été le rôle et le poids des acteurs locaux et des différentes communautés à travers leurs associations dans cette genèse ? Quel rôle a joué la capitale dans la promotion ou au contraire le retard de l’évolution urbaine de Sousse ?
Quels ont été enfin les mécanismes de production de la ville neuve dans les vingt premières années de son existence et de sa mise en place ?
A cet ensemble de questions, notre recherche tentera ici d’aborder des éléments de réponse.

شهدت مدن ولاية تونس، في النصف الثاني من القرن التاسع عشر، تحولات ملحوظة مرتبطة بالاضطرابات الكبرى التي تشهدها منطقة البحر الأبيض المتوسط وفي منطقة البحر الأبيض المتوسط رؤية جديدة للفضاء الحضري حملتها الإمبراطوريات الاستعمارية. هذه التحولات لديها غالبًا ما بدأت قبل الهيمنة الاستعمارية. سوسة مدينة في الساحل التونسي المقر قائدة ومعقل عسكري من عام 1881 حتى عام 1922 هو أيضًا مكان هذه المواجهات السياسية والعمرانية والمعمارية، موضوع بحثنا هنا، في العقدين الأولين من تشكيل وبناء المدينة الجديدة. كيف تم إنشاء المدينة الجديدة بسوسة وما هي الصعوبات وبموجبها إشكالية؟ ما هو دور ووزن الجهات الفاعلة المحلية والمجتمعات المختلفة؟ من خلال جمعياتهم في هذا التكوين؟ ما هو الدور الذي لعبته العاصمة في تعزيز أو بالعكس تأخر التنمية الحضرية لسوسة؟ وأخيرا، ما هي آليات إنتاج المدينة الجديدة في العشرين الأولى؟ سنوات من وجودها وتأسيسها؟ سيحاول بحثنا تقديم بعض الإجابات على هذه المجموعة من الأسئلة

The towns of the regency of Tunis experienced, in the second half of the 19th century, notable transformations linked to the great upheavals taking place in the Mediterranean and to the new vision of urban space carried by the colonial empires. These transformations have often initiated prior to colonial domination. Sousse, city in the Tunisian Sahel, headquarters of a caïdat and military stronghold from 1881 until 1922 is also the place of these political, urban and architectural confrontations, object of our investigation here, in the first two decades of the formation and construction of the new city. How was the new city set up in Sousse, with what difficulties and according to which problematic? What was the role and weight of local actors and different communities? through their associations in this genesis? What role did the capital play in promoting or on the contrary the delay in the urban development of Sousse? Finally, what were the mechanisms of production of the new town in the first twenty years of its existence and its establishment? Our research will attempt to provide some answers to this set of questions.

Mots clés

Sousse, urbanisme, avenue de la Quarantaine, architecture coloniale

Pour citer cet article

Leila Ammar, « Sousse, le tracé de l’avenue de la Quarantaine : genèse et construction de la ville neuve (1884-1904) », Al-Sabîl : Revue d’Histoire, d’Archéologie et d’Architecture Maghrébines [En ligne], n°1, Année 2016.
URL : http://www.al-sabil.tn/?p=1913

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Texte integral

Introduction

Les villes de la régence de Tunis ont connu, dans la seconde moitié du XIXème siècle, des transformations notoires liées aux grands bouleversements qui s’exercent en Méditerranée et à la nouvelle vision de l’espace urbain portée par les empires coloniaux. Ces transformations ont bien souvent été initiées en amont de la domination coloniale. Ainsi, à Tunis de 1860 à 1935, on assiste à un renouvellement urbain et à la mise en place de la ville moderne, d’abord sous l’égide des autorités beylicales (1858-1880) puis sous la domination du projet colonial (1881-1935). Sousse, ville du Sahel Tunisien, siège d’un caïdat et place forte militaire de 1881 jusqu’en 1922 est également le lieu de ces confrontations politiques, urbaines et architecturales, objet de notre investigation ici, dans les deux premières décennies de la formation et de la construction de la ville neuve.

Nos interrogations sur la ville de Sousse au moment de la naissance de la ville neuve s’articulent avec la disponibilité et la qualité des archives qu’il nous a été donné de consulter. Ces archives relèvent essentiellement de la cartographie urbaine rencontrée dans les différents guides de voyageurs de l’époque, du dépouillement de la presse locale et d’observations de terrain à partir de la ville actuelle qui soulignent des questions précises : quel était le statut des terrains de la ville ancienne à proximité des remparts comme zone d’interaction ? Quelles traces gardent la ville ancienne des premières modifications et transformations, réquisitions au lendemain de l’occupation française ? Comment le Génie militaire a-t-il influencé le devenir de la ville neuve et de la ville ancienne ?


D’autres interrogations viennent à l’esprit. Comment a été mise en place la ville neuve à Sousse, avec quelles difficultés et selon quelles problématiques ? Quel a été le rôle et le poids des acteurs locaux et des différentes communautés à travers leurs associations dans cette genèse ? Quel rôle a joué la capitale dans la promotion ou au contraire le retard de l’évolution urbaine de Sousse ?

Quels ont été enfin les mécanismes de production de la ville neuve dans les vingt premières années de son existence et de sa mise en place ?
A cet ensemble de questions, notre recherche tentera ici d’aborder des éléments de réponse. Même si nos réponses sont lacunaires et reflètent en cela l’état de nos investigations et des sources, nous avons tenté d’éclairer l’histoire urbaine et l’histoire de la forme urbaine de Sousse à travers, d’une part la cartographie, d’autre part l’analyse des faits et du rôle des acteurs locaux. Nous tenterons ainsi de souligner dans l’histoire de la genèse de la ville neuve de Sousse les ruptures et les continuités et d’approcher le rôle des différents acteurs à la lumière des archives disponibles. On ne trouvera donc pas ici une analyse des discours doctrinaux et officiels mais un essai sur la transformation de la ville de Sousse en liaison avec les débats en matière d’urbanisme hygiénique et d’architecture de l’époque.

La confrontation entre la ville ancienne et la ville neuve, l’attitude du Génie militaire vis-àvis de l’implantation des premiers tracés, les réactions de la population et des élus du Conseil Municipal aux différents travaux de mise en valeur de la ville nouvelle, les résistances, les difficultés et les permanences recevront ici une tentative d’élucidation. Notre recherche originale sur l’histoire de la forme urbaine à Sousse de 1884 à 1904 s’appuie sur de rares travaux antérieurs parmi lesquels il faut citer celui de Afef Ghannouchi (2011) sur la construction des paysages urbains de Sousse de 1881 à 1930. En effet, l’essentiel des travaux antérieurs sur Sousse dont rend compte notre bibliographie s’intéresse d’une part à la chronologie urbaine (Ameur Baaziz 2005), à l’histoire urbaine et sociale (Anouar el Fani 1984), à l’histoire juridique et institutionnelle (Ali Noureddine 1989) et à l’histoire des communautés de la ville de Sousse (Kamel Jerfel 2001).

Notre travail se présente dans la continuité des travaux antérieurs avec cette spécificité qu’il s’intéresse aux transformations de la forme urbaine de Sousse, ville secondaire et rivale de Tunis, à partir des archives et du terrain.

Sousse, ville portuaire et commerciale au cœur du Sahel dont elle est une plaque tournante, est néanmoins une ville secondaire peu étudiée dans l’armature urbaine des villes de la Régence pendant la période du protectorat. Elle souffrira de la prépondérance de Tunis et de la centralisation des décisions importantes. Elle connaîtra de la fin du XIXème siècle au début du XXème siècle un essor relatif et une transformation notoire portés par ses élus ainsi que par sa population plurielle.

1. Problématique

A Sousse, ville siège d’un contrôle civil et d’une commune à partir de 1884, on assiste à la naissance des premières implantations militaires dès 1881-1882 et à celle d’une ville nouvelle dès 1884-1885, juxtaposée et séparée de la médina par les premiers tracés des boulevards qui l’entourent 1 . C’est à la genèse de cette ville nouvelle mais aussi aux impacts et aux transformations de la ville ancienne de 1884 à 1904, que se consacre cette recherche qui s’appuie sur les sources cartographiques et iconographiques essentiellement et sur le dépouillement de la presse locale à cette période. Rares sont les travaux qui ont pris pour objet l’histoire urbaine et l’histoire de la forme urbaine à Sousse durant la période coloniale. Ils existent pourtant et forment un canevas d’études historiques éparses dans divers domaines scientifiques.2 Les sources pour l’histoire urbaine de Sousse demeurent cependant bien lacunaires, les archives municipales de Sousse ont été en grande partie détruites dans les années 1970 et ce qu’il en reste a aujourd’hui été dispersé. Cependant, nous pouvons retrouver trace de certaines sources cartographiques et iconographiques pour la ville de Sousse à travers les plans édités par les guides de voyageurs du début du siècle et l’existence de nombreuses cartes postales et vues anciennes de la ville. De même, nous est parvenu un rapport de mission d’officier du génie militaire en exercice à Sousse durant les années 1884-1885 fort instructif. C’est à ces sources que nous nous intéresserons ici, sources que nous croiserons avec les documents et sources écrites disponibles pour la période qui nous intéresse.

Résultat d’histoires variées, l’espace urbain est autant expression du contexte que mode de connaissance de ce qui a présidé à la formation des lieux. A Sousse comme dans toutes les villes, nous nous rendons compte que le site préalable aux transformations et à l’avènement de la ville neuve est décisif.

Quant au terrain actuel, son observation et son analyse urbaine permettent de faire remonter des interrogations vers le passé. L’espace urbain objet d’une inscription antagoniste des pouvoirs et des intérêts mais aussi objet d’appropriations et de représentations est au cœur du questionnement sur les modes de formation et d’organisation des villes et de ce qui nous préoccupe dans cette étude de la ville de Sousse à l’aube de la formation de la ville neuve. C’est donc à l’espace matériel et à l’histoire de la forme urbaine de la ville de Sousse de 1884 à 1904 que nous nous consacrerons. Nous tenterons ici de croiser, à travers les sources disponibles, l’histoire et la forme, le fixe et le changeant, l’écrit et le dessin.3

Nous nous sommes livrés pour cela à une cartographie originale de la ville de Sousse mise à la même échelle au 1/5000° de 1881 à 1903. Nous disposons par ailleurs d’un document cartographique inédit sans titre et sans date, issu des archives municipales de Sousse, qui dresse le tracé de l’avenue de la Quarantaine et de ses abords à la fin du XIXème siècle. Nous avons pu dater par recoupements et comparaisons ce plan inédit des années 1888-1890 et nous faisons l’hypothèse qu’il est issu des services de la Voirie et des Travaux de la Ville de Sousse à ce moment. Ce document original est une source inestimable pour la compréhension des premières transformations matérielles de la ville de Sousse dans la seconde moitié du XIXème siècle à l’initiative de l’administration du Protectorat.

La ville de Sousse, au moment du protectorat de 1884 à 1904, soit sur une période de 20 ans qui a vu advenir bouleversements politiques, sociaux, économiques et spatiaux, mais aussi résistances et permanences, sera ici interrogée et analysée sur le plan des formes urbaines (premiers tracés et lotissements), des techniques mises en œuvre, des modèles urbanistiques et des enjeux spatiaux urbains .

Que donnent à lire les anciennes cartes de la ville de Sousse dont les premières sont dressées en 1881 ? Que nous disent-elles des premières transformations de la ville et de la genèse de la ville neuve à travers le tracé décisif de l’avenue de la Quarantaine ? Comment s’est déroulée la confrontation entre la ville neuve et la ville ancienne aux premiers moments de l’implantation du noyau moderne ? Autant de questions auxquelles nous tenterons ici une réponse.

Fig. 1. Sousse en 1885, d’après les Guides Joanne et d’après la Brigade Topographique du Ministère de la Guerre.

2. Hypothèses

Comme toutes les villes, Sousse, de 1884 à 1904, s’est implantée sur son arrière-pays et sur un site original. Elle s’est développée sur les terrains agricoles et les pistes, les oliveraies, les dunes maritimes et les anciens cimetières musulmans, chrétiens et juifs à ses alentours et à partir des routes principales menant aux différentes localités et villes voisines. Il faut attendre 1896 pour voir relier la ville à la capitale par le chemin de fer et 1898 pour l’inauguration du nouveau port capable d’assurer les exportations et la navigation modernes.

Sousse est en 1900 une ville de 15.000 habitants et chef-lieu d’un contrôle civil de 200.000 habitants. La ville ancienne, entourée de remparts, comprise dans un carré de 700 mètres par 500 mètres, a gardé à cette date l’essentiel de ses traits originaux. Elle est entourée de boulevards extérieurs larges qui la séparent de la ville neuve en construction. Celle-ci s’est tout d’abord développée à proximité des dunes et de la mer au nord-est au lieu-dit « Ardh Bhar Zebla », ancien terrain habous et sur un cimetière musulman adjacent à la porte nord-est Bab al Bahr.

A l’instar de Tunis, les autorités du protectorat n’ont pas procédé à de grandes démolitions dans la ville ancienne. Ils ont réquisitionné d’anciens bâtiments dans la médina pour y installer Hôtel de Ville, Contrôle civil, Eglise, Tribunal, Prison, qui se tiendront dans la vieille ville jusqu’en 1910. D’autre part, il semble que l’intervention précise des services de la voirie se manifeste surtout à partir de 1888 (date de la promulgation du Règlement de voirie de Sousse) et que jusque-là, la ville neuve n’apparaisse pas dans les projets municipaux. Ainsi, les boulevards de ceinture de la Médina de Sousse coïncident-ils avec la mise en œuvre effective du Règlement de voirie de la ville d’octobre 1888 dans les années qui suivent.4 (1888-1890).

Notre hypothèse principale est que dans le développement de la ville de Sousse entre 1884 et 1904, le changement de statut de l’espace urbain est fortement lié d’une part à celui d’une ville de servitude militaire occupée par les agents du protectorat, d’autre part aux enjeux d’une ville portuaire et commerciale. L’originalité de la population de Sousse qui mêle tunisiens musulmans et juifs, français, européens, italiens, maltais joue aussi un rôle déterminant dans l’histoire de la formation des quartiers de la ville.

Enfin, le statut de la ville de Sousse dans la région du Sahel, du Centre et du Sud dont elle constitue le pôle principal -rayonnant sur les villes du Sahel , Mahdia, Moknine, Monastir, Kairouan et même Sfax- n’a pas manqué d’avoir des répercussions sur les décisions des autorités administratives centrales, municipales et sur l’évolution urbaine de la ville.

3. Les sources de la recherche, Le terrain, les sources cartographiques, les sources iconographiques, les sources écrites

Parmi les différentes sources de la recherche nous rencontrons :
* Le terrain
* Les sources cartographiques :
  - Les plans édités par les guides de voyageurs Hachette, Joanne et Piesse.
  - Le plan de Sousse en 1899 édité par le Service des Travaux Publics, Archives Nationales de Tunisie.
  - Le plan du Tracé de la Quarantaine 1888-1890, Archives municipales de Sousse.
* Les sources iconographiques :
Les vues, photos et cartes postales anciennes de la ville de Sousse.
* Les sources écrites :
    - Le mémoire du Capitaine officier de Renseignements de la Direction de l’Occupation du 7 octobre 1885.
    - Le Règlement de voirie de la ville de Sousse du 2 octobre 1888, (M. Bompard, supplément à la législation de la Tunisie 1888-1896, Paris, Leroux éditeur 1896).
    - La presse locale, Le Journal « L’Avenir de Sousse, organe des intérêts Politiques et Economiques du Sahel Tunisien », dépouillement des années 1888 à 1905, Archives Nationales de Tunisie.

4. Sousse, 1884-1904, le tracé de la Quarantaine : genèse et construction de la ville neuve

4.1 .1 ère période, 1884-1888 : La lente genèse de la ville neuve

« … La ville de Sousse a un aspect pittoresque et gracieux ; les rues sont assez larges et bien percées, le climat y est sain, surtout depuis que par la création d’un conseil municipal, la propreté a pu être obtenue. Les fièvres et les épidémies y sont presque inconnues. La partie haute de la ville est habitée par les musulmans ; la partie basse par les israélites et les européens. (…) Le port actuel n’est qu’une rade dont le mouillage est peu sûr par les vents d’Est et de Nord-Est ; il s’étend en face de la ville. (…) La ville de Sousse comprend aujourd’hui une population de 6000 musulmans et environ 2500 israélites et européens de toutes nationalités. (…) Elle est certainement un des centres agricoles et maritimes les plus considérables de la Régence. Chef-lieu de la province du Sahel, placée au milieu du grand golfe qui s’étend du Cap Bon à la Tripolitaine, ayant un port meilleur que la plupart de ceux de la côte orientale, elle est la véritable capitale de la Tunisie centrale et méridionale. Entourée de nombreux villages et de forêts d’oliviers, elle ne fait qu’accroître sa richesse et il est certain que lorsqu’elle sera reliée à Tunis par un chemin de fer, elle retrouvera sa splendeur d’autrefois. (…)»5 . Ainsi s’exprime dans son mémoire en 1885, le Capitaine officier de renseignements de la direction de l’occupation.

Sousse a vu la création de sa commune par décret du 16 juillet 1884 (3 Ramadan 1301), constituant un corps municipal composé par un président (français), deux vice-présidents (français), quatre conseillers européens, quatre conseillers musulmans et un conseiller israélite. Il semble que ce corps municipal ait souffert de lenteurs et d’inefficacité à ses débuts. C’est avec la réorganisation de la municipalité en mai 1890 que l’administration de la cité reprendra de la vigueur et de l’énergie6 . La période qui s’étend de 1884 à 1888 est celle de la lente gestation de la ville neuve qu’un règlement de voirie du 2 octobre 1888 vient conforter dans les intentions si ce n’est dans les réalisations.

Sousse, en 1885, est une ville de près de 9.000 habitants où la part de la population européenne est essentiellement celles des italiens qui ont connu des migrations depuis la seconde moitié du XIXème siècle. La médina prise dans son enceinte formant un parallélogramme irrégulier s’étend sur 32 hectares, est flanquée de trois portes : Bab Bhar au nord, Bab al Gharbi à l’ouest, Bab Jdid à l’est. Au nord, s’étend un grand cimetière musulman qui jouxte l’enceinte et se prolonge vers les dunes au lieu-dit Bou Jaafar où se tiennent Quarantaine et batterie du môle nord. Face à Bab Bhar se trouvent le marché et les abattoirs prolongés par l’épi de la batterie et du môle sud. A l’est, l’enceinte de la médina est battue par les flots et une mince langue sablonneuse sépare la rade du vieux port de la ville. Au sud se tient le cimetière catholique au sortir de la place Jabbanat al Ghorba (cimetière des étrangers). A l’ouest de la ville ancienne dominée par la Qasbah, se trouve une esplanade qui a vu l’implantation d’un camp militaire français dès 1882. Ce camp retranché domine les environs. Il comprend un hôpital et des baraquements, des magasins et campements et est alimenté en eau par des conduites souterraines venant de la Quarantaine.

Au nord, à l’ouest et au sud, le territoire proche hors les murs est sillonné de routes et de pistes conduisant aux villages voisins de Qalac a Kbira, Hammam Soussa, Qalac a Sghira, Msaken, Monastir.

La médina comprend deux grands parcours : d’ouest en est par la porte Bab al Gharbi vers la porte Bab Jdid et par les rues Souq al Qaïd, Souq al Rbaac , rue du général Bertrand. Un second parcours du sud vers le nord par les rues al Hajra, al Marr, d’Angleterre, de France vers Bab Bhar. La ville de Sousse en 1885, essentiellement constituée par la médina, semble avoir conservé ses principales caractéristiques et sa parure monumentale. Elle compte deux grandes mosquées, quarante-trois masjids, une synagogue et une église. En outre elle comprend un réseau de souqs dans sa partie centrale et de nombreux fondouqs et oukalas. 7Le château fortifié du Ribat et la Grande Mosquée marquent la partie nord de la ville à proximité de l’enceinte, le premier ayant incité à la construction de la seconde.

L’analyse des sources cartographiques et la lecture du mémoire du capitaine officier de renseignements d’octobre 1885 nous permet d’émettre l’hypothèse que l’intervention française dans la ville de 1884 à 1888 a été minimale. En effet, la cartographie de 1884 à 1888 ne présente aucune trace d’aménagements hors les murs de la médina à l’exception du camp militaire de l’ouest et du quartier de la Quarantaine au nord. De même, le mémoire du capitaine déjà cité ne mentionne pas de travaux neufs ni la naissance d’une ville européenne hors les murs. Ainsi, les français en arrivant à Sousse ont d’abord réquisitionné des bâtiments et monuments existants pour y installer le contrôle civil (dans le Dar al Charc , palais de justice), l’hôtel de ville (à l’angle des rues d’Angleterre et du Général Riu), une église et un tribunal à proximité du château fortifié du Ribat. A ces interventions de substitution s’ajoutent la modification de la toponymie de certains axes importants et la régularisation de certaines voies afin de faciliter les accès dans la ville.

Ainsi, le percement hors les murs du boulevard Charles Rouvier (actuel avenue Mohammed V) et du boulevard du Nord (actuel avenue Mohammed Maarouf) avec l’implantation d’une halle aux grains sur l’enceinte nord à Bab Bhar semblent avoir été décidés et réalisés entre 1888 et 1890.

En somme, les Français se préoccupent plus d’asseoir dans un premier temps la sécurité de la ville frappée de servitude militaire grâce au camp militaire ouest et à l’acheminement matériel de l’approvisionnement vers Kairouan centre de rébellion sous surveillance constante. C’est ainsi qu’une ligne de chemin de fer Kairouan-Sousse verra le jour en 1888 pourvue d’un système de rails à voie étroite et d’une gare qui jouxte le cimetière musulman nord. 8

Fig. 2. Ville de Sousse en 1885, échelle du document original 1/5000°, source : carte de la ville de Sousse en 1885, Guides Joanne, d’après la Brigade topographique du ministère de la guerre et la cartographie de la médina de Sousse de Serge Santelli (1986). Cartographie et mise en forme au 1/5000°, Leila Ammar, 2011.

L’idée d’une ville neuve destinée à la population européenne en dehors de la cité millénaire se forme dans les esprits des administrateurs et du conseil municipal dans les années 1888-1890. En effet, des travaux d’ensablement et de conquête de terres sur la mer ont eu lieu entre le môle nord et le môle sud au lieu-dit Ardh Bhar Ezzibla. De même, le long de l’enceinte est des terrains ont été conquis sur les flots ménageant une vaste esplanade face à la rade. C’est dans ces deux directions que seront tracées les premières voies de la ville nouvelle avec comme origine le tracé nord sud de l’avenue de la Quarantaine.

Pensé et décidé en 1888 et réalisé de 1888 à 1890, ce tracé fondateur de la ville neuve s’adosse à la limite est du grand cimetière musulman qui lui imprimera sa direction. Il s’inscrit ainsi dans un territoire préexistant et en garde les traces.

4.2. 2ème période, 1888-1904 : le tracé de la Quarantaine et la construction de la ville neuve

Avec le tracé de l’avenue de la Quarantaine pensé en 1888 et approuvé au Conseil Municipal de janvier 1889, la ville neuve européenne de Sousse fait acte de naissance.9 Cette voie de 24 mètres de large et d’un kilomètre de long comprend une chaussée empierrée de 10 mètres d’emprise et 7 mètres de contre-allée de part et d’autre devant être converties en trottoirs. Elle part de Bab Bhar et doit se prolonger jusqu’au marabout de Bou Jaafar, lieu encore en dehors du périmètre de la ville en 1888. Cependant, la Municipalité ne maîtrise pas toutes les données de ce chantier car nombre de décisions sont prises à Tunis, notamment la promulgation et la signature du décret de mise en état de viabilité de l’avenue. Il faudra attendre l’année 1890 pour voir s’achever les travaux de la première section de la voie.

Celle–ci se déploie sur une longueur de 900 mètres depuis le mausolée de Sidi Yahiya et le parc d’artillerie jusqu’au lieu-dit de la Quarantaine. L’avenue dessert à l’est le chemin de fer de Sousse à Kairouan et une école d’infirmières et à l’ouest une série de rues et d’îlots qui formeront le premier quartier de la ville neuve10. L’avenue de la quarantaine et le quartier formé à partir de ses premières rues transversales constituera l’essentiel de la ville neuve jusqu’aux années 1900. S’y tiennent entre 1895 et 1900 de grands hôtels tels l’Hôtel de France, du Sahel et le Grand Hôtel, la Prison, le Marché couvert municipal, la Poissonnerie, un kiosque à musique sur le rond-point de la Douane et le cours de la Marine, un Casino. L’avenue de la Quarantaine est donc bien le lieu initiateur de la ville neuve. Mais l’édification des rues rencontre un certain nombre d’obstacles et les chantiers ne se suivent pas forcément. Ainsi, le journal « l’Avenir de Sousse » témoigne-t-il des lenteurs rencontrées et des mésaventures d’une ville neuve en construction concurrencée par les usages et les pratiques urbaines de la cité millénaire préexistante d’une part et mise en attente par les avatars des volontés administratives centralisatrices d’autre part.11 En effet, dans les volontés de mise en œuvre d’une ville européenne nouvelle, le Conseil municipal de Sousse se heurte aux décisions qui tardent à venir de Tunis et de la Direction Générale des Travaux Publics. D’autre part, le Génie s’oppose au déclassement de la ville et à la démolition des remparts de la ville ancienne notamment sur son front est. Enfin, malgré les discours et les volontés municipales de donner à Sousse l’allure d’une ville neuve pimpante, les usages anciens perdurent et se heurtent au règlement de voirie et au service d’hygiène municipal.

« Nous attirons l’attention des agents de la voirie municipale sur la tendance qu’ont depuis quelques temps les arabes à transformer les rues du quartier européen en véritables écuries…. La circulation y devient impossible de jour et de nuit : d’un côté de la rue on met les charrettes et les arabas et de l’autre côté on attache les chevaux et les mulets. C’est très commode et surtout très …économique pour les propriétaires des attelages, mais les habitants du quartier ? Par où doivent-ils passer ?... Nous croyons aussi qu’il serait bon d’obliger à nouveau les propriétaires de terrains non vendus à refaire leurs clôtures …ces terrains revenus à l’état de terrains vagues, ont été, comme les rues, occupés par les arabes qui y ont installé des gourbis et en ont fait de véritables fondouks…. Un semblable état de choses constitue un danger au double point de vue de la circulation et de l’hygiène publique et il importe qu’il cesse au plus tôt … » 12 .

Ainsi, nombreux sont les exemples où les usages et le mode de vie de la population musulmane vient perturber l’idée que se font les édiles et les européens d’une ville neuve bâtie et habitée selon les canons de la civilisation moderne.

« … On pose sur la Place de la Marine en ce moment de nouveaux bancs. Le modèle qui a été choisi est très solide et très pratique. Mais les Arabes n’ont déjà pas attendu que les scellements soient terminés, pour s’allonger sur ces bancs comme on a l’habitude de les y voir. Ne pourrait-on prendre un arrêté comme on l’a fait à Tunis, l’année dernière pour empêcher de transformer ces bancs en de véritables dortoirs, au grand détriment des promeneurs fatigués ?» 13 .

Fig. 3. Sousse, Cours de la Marine et Douane, Circa 1903, Source : collection particulière, L. Ammar.
Fig. 4. Sousse le rempart nord de la vieille ville et le cimetière musulman qui ne sera définitivement déclassé qu’en 1905, Circa 1895, Source : collection particulière, Espace Diwan.
Fig. 5. Sousse le rempart sud et la ville ancienne vers le port, circa 1900, Source : Collection particulière, Espace Diwan.
Fig. 6. Avenue de la Quarantaine, le Casino et l’Hôtel de France, Circa 1903, Source : Collection particulière, L. Ammar
Fig. 7. Avenue de la Quarantaine, renommée Avenue Krantz, circa 1904, Source : [www.tunisie-cpa-1900.net]
Fig. 8. Sousse, la rue Jules Ferry au sortir de l’avenue de la Quarantaine, Circa 1900, Source : [www.tunisie-cpa-1900.net].
Fig. 9. Sousse : Tracé de la Quarantaine 1888-1890, Source : Archives municipales de Sousse, Cartographie et mise en forme, L. Ammar, 2011.

Tandis que la ville de Sousse se transforme lentement les injonctions fusent tant de la part du Conseil Municipal que de celle des citadins et acteurs européens. Le premier réclame à corps et à cri une augmentation du budget municipal qui souffre de déficit chronique,14 la démolition des remparts est, l’éclairage à l’électricité, l’assainissement des rues de la ville neuve, la concrétisation de la liaison Sousse-Tunis par le chemin de fer, la construction d’un nouveau port .Les seconds relaient le corps municipal pour faire valoir la prééminence de leurs droits et de leur mode de vie.

Ainsi, le journal, l’Avenir de Sousse du 20 novembre 1891 résume- t-il les espoirs des citadins européens après l’avancement des travaux de la ville neuve (prison civile, rues Villedon et de France, rue de Grèce, éclairage de la ville à l’électricité) « …. D’ici très peu de temps, la vieille ville arabe Susa sera transformée de fond en comble et changée en une véritable ville européenne ».

Mais la vieille ville résiste et perdure dans ses institutions et usages. Certes, les citadins musulmans n’ont pas la parole dans le journal l’Avenir de Sousse, mais leurs actes et leur implication dans le projet de la ville neuve comme dans les répercussions de ce projet sur la ville ancienne transparaissent en négatif au travers de la presse locale. Il faut ouvrir la ville ancienne et démolir les remparts pour permettre à la ville neuve d’exister pleinement. Les débats sont ardus et opposent d’une part les institutions locales de la vieille ville, les militaires du Génie et les élus du Conseil Municipal.15 En effet, trois nouvelles portes seront ouvertes en 1892, Bab Jibli (Porte Nord), Bab Qibli (Porte Sud) et Bab al Finga (adjacente à la porte Ouest). De même, en 1892, le tronçon des remparts est entre Bab Bhar et Bab Jdid sera-t-il démoli, initiant par là le démarrage de nouveaux travaux viaires le long de l’enceinte est disparue avec les boulevards Emile Loubet (1905) et Armand Fallières (1908) face à la rade et au port. Dans la ville ancienne, les initiatives municipales favorisent aussi une meilleure circulation en supprimant les irrégularités de certaines voies, telles celles de la rue des sept tournants (nahj sabc a leftat).16 Cependant, la Médina conserve sa structure, ses monuments et ses équipements principaux. A l’Est, l’ouverture d’un front de la ville neuve le long de l’ancien rempart et en face du futur port favorisera l’implantation de nouveaux quartiers le long de ces voies et de la route de Monastir, étendant le périmètre de la ville neuve qui sera triplée en surface et consacrée par décret beylical du 26 novembre 1894.17

Cette nouvelle étendue du périmètre et de la surface de la ville qui élargit le périmètre essentiellement à l’Est induit une augmentation des charges et des ressources municipales par suite des taxes de caroube et de balayage appliquées aux immeubles compris dans la nouvelle enceinte.

Ainsi, la genèse et la construction de la ville neuve ont connu au cours de la période 1884- 1890 des avancées notoires mais aussi des lenteurs dues aux débats nourris sur différents enjeux importants et décisifs quant à son évolution, notamment sur la question des servitudes militaires et du déclassement de la ville. C’est à l’examen de ces questions que nous nous livrons dans la suite de cet exposé.

4.2.1. Les questions importantes dans l’évolution de la ville neuve

- La voirie municipale, les remparts et l’assainissement

Tout au long de la gestation et des débuts de la ville neuve, la question de la voirie municipale, des remparts et de l’assainissement a pesé sur les débats et les réalisations. Intramuros, les rues d’Angleterre, du Général Riu, de Paris et de France ont connu élargissement et régularisations en vue de faciliter la circulation. Tout au long de l’enceinte intramuros, des voies élargies ont permis de faire le tour de la ville et d’installer de nouvelles maisons de rapports. A l’extérieur des remparts, le Boulevard Charles Rouvier (1889) et le Boulevard du Nord (1890) sont venus dégager la vieille ville et permettre le mouvement des troupes autour de la cité millénaire. En 1892, l’avenue de la Porte Sud consécutive au percement d’une nouvelle porte dans le rempart sud permettra les liaisons avec l’arrière-pays littoral. Mais tous ces travaux de voirie sont onéreux et le budget municipal accuse des déficiences dont la presse locale se fait écho. De plus, il faut gérer les services de voirie et d’hygiène chargés d’assurer le contrôle et l’accessibilité de ces nouveaux espaces publics. Agents de voirie, agents des services du nettoyage et du balayage, service des égouts tout cela conduit le conseil municipal à réclamer du renfort et de subsides auprès des autorités centrales et de la Direction générale des Travaux publics.18 Sousse est une ville en plein essor mais les décisions se font attendre et prennent parfois des années.

La question des remparts a longtemps taraudé les esprits. Plusieurs voix s’élèvent pour réclamer leur démolition et ouvrir ainsi la vieille ville à de nouveaux aménagements. Il semble que les volontés de transformer la vieille ville en une ville européenne aient trouvé de l’écho sans toutefois excéder les discours car le terrain, les coutumes et les usages anciens résistent. Les militaires du Génie s’opposent pour des raisons défensives à la démolition des remparts. Finalement, la vieille ville sera percée à trois endroits et une partie du rempart est sera remplacée par un boulevard de ceinture.

Quant aux égouts, question épineuse et onéreuse, il faudra attendre les années 1907-1908 pour voir la ville de Sousse dotée d’un réseau d’assainissement moderne couvrant toutes ses parties et votée au conseil municipal. Pour l’heure, dans les années 1890-1894 les égouts de la ville se résument aux collecteurs situés dans le quartier de Bhar Azzibla à proximité de l’avenue de la Quarantaine. Ces collecteurs partent d’un collecteur principal situé à Bab Bhar. Tous ces collecteurs se déversent dans la mer où ils sont prolongés de manière à atteindre provisoirement au moins les fonds d’un mètre. Les travaux d’assainissement de la ville seront ensuite menés au coup par coup jusqu’au plan d’assainissement général présenté au conseil municipal en 1906. La presse locale témoigne de 1889 à 1904 des désagréments d’un réseau insuffisant et des odeurs nauséabondes à Sousse particulièrement dans les quartiers de la ville neuve aux abords de l’été.19

« …. Jamais autant que ces jours derniers, ne s’étaient abattues sur le quartier européen, de Bou-Jaffar à la pointe de la Marine, les odeurs nauséabondes filles du typhus ou du choléra, qui, par la grâce de l’administration municipale et des travaux publics, ont transformé nos plages fraîches en des dépotoirs insalubres et dangereux. Jamais aussi la preuve n’a été mieux faite que cette année de l’imprévoyance commise en choisissant comme débouché des égouts le front de mer qui borde le quartier européen, voué à l’infection estivale, plus difficile à supporter que les 36 degrés que nous octroie le soleil joyeux…. » 20 .

La question de l’assainissement révèle par ailleurs un débat de fond sur le choix de l’emplacement des premiers tracés de la ville neuve. Fallait-il les implanter au nord à proximité du front de mer et de la Quarantaine, des dunes et de la ligne de chemin de fer Bône Guelma ou au sud où s’ouvrent de grands espaces propices aux agrandissements et élargissements ?

En fait, la ville neuve naquit en un quartier compact et serré entre le cimetière musulman nord et la mer. Du point de vue de l’assainissement, le choix de la pente à donner à l’écoulement et au déversement indiquait « naturellement » la plage nord faisant front au nouveau quartier. Mais cette plage était pour ainsi dire souvent impraticable. L’été, lorsque la mer se retire, elle laisse entre le flot et la bouche des caniveaux un espace d’une vingtaine de mètres de fond d’algues sur lequel se déversent diverses matières qui s’étendent et forment un dépotoir malodorant. Ainsi, les raisons pour lesquelles les édiles municipaux et le Génie avaient choisi malgré tout de commencer l’implantation de la Sousse européenne dans un terrain aussi contraignant, pris entre le grand cimetière musulman et la mer, paraissent remonter à la conjoncture particulière des années 1884-1890 et à un certain pragmatisme de l’urbanisme qui élira le site du nord en fonction d’un certain nombre d’installations préexistantes et de la proximité du port.

- La question du chemin de fer

La question du chemin de fer et de la liaison de Sousse aux villes du Sahel (Kairouan, Mahdiyya, Monastir, M’saken) et du Sud (Gabès) mais avant tout celle de sa liaison à la capitale taraude les esprits depuis les débuts de l’implantation militaire française. Il fallait au début acheminer les vivres et le matériel militaire en direction de Kairouan place forte en rébellion constante. Puis vint la nécessité d’organiser et de rénover les routes et les pistes desservant le Sahel dans l’intérêt militaire et commercial de Sousse. Enfin, la question des chemins de fer du Sahel est posée dès 1890. La hantise des élus locaux est de voir détourner au profit de Tunis le commerce intérieur avec le Sahel et la région du centre et de faire ainsi de Tunis le port de Kairouan en éliminant Sousse. La question du chemin de fer est ainsi liée à la vitalité économique de la ville de Sousse et à sa capacité portuaire à commercer avec l’important port de Marseille et avec le Levant.

Dès 1890-1891, les voix s’élèvent pour réclamer des infrastructures ferroviaires et portuaires à la mesure de la capitale du centre et du Sahel. « … Ce qui nous presse le plus nous autres Soussiens, c’est d’avoir une bonne ligne marchande poussée vers l’intérieur ; une ligne de Sousse à Kairouan se prolongeant par Hadjeb al Hioun sur Gafsa et Tozeur. Sousse doit être le port, non seulement de Kairouan, mais du Djérid et du Grand Sud Tunisien ». (….). Les premiers projets de lignes ferroviaires qui supprimaient la liaison Sousse - Kairouan tendaient à défavoriser Sousse au profit de Tunis21. Il existait même des projets tendant à supprimer carrément la liaison des villes du centre avec Sousse. De 1889 à 1896, année de la mise en service de la ligne de chemin de fer Sousse-Tunis et de la construction de la gare, bien des écrits auront été jetés sur le papier dans la presse locale et bien des voix municipales se seront élevées pour défendre la prospérité et la vitalité de Sousse face à Tunis.22 Ainsi, les rivalités Sousse Tunis sur le plan du chemin de fer et du port se sont-elles révélées très tôt à travers les débats, les uns insistant sur la nécessité pour Sousse d’un chemin de fer de pénétration vers Kairouan et audelà vers le Djérid, les autres prêchant pour une ligne Tunis-Kairouan-Sousse destinée d’abord à desservir le port de Tunis.

- La question du port

La question du port et celle du chemin de fer étaient intimement liées dans l’esprit des édiles et des citadins de Sousse. A l’instar du chemin de fer, la question du nouveau port de Sousse a été l’objet de vifs débats dès le début de l’occupation française. En effet, Sousse joue sa place en tant que capitale économique et administrative du Sahel et porte de sortie des phosphates et matières minières venant de l’Ouest du Centre et du Sud Tunisiens. Mais les nécessités d’un port sûr ont été très tôt révélées par le fait qu’il fallait d’abord pour les militaires et les commerçants maritimes pouvoir y débarquer. Le vieux port de Sousse établi le long d’une rade en face des remparts Est de la médina avait l’inconvénient de ne pas permettre l’accostage des navires et de laisser passer uniquement les barques à fond plat calant à peine un mètre.

Des travaux d’amélioration y furent menés de 1885 à 1890, telle la construction d’une jetée et de quais sans profondeur, obligeant les navires à accoster à plus de 800 mètres de la ville et à débarquer les marchandises par chaloupes. Pour remédier à ces inconvénients et considérant l’enjeu pour l’avenir du commerce à Sousse, un port fonctionnel permettant l’accostage des gros transports était réclamé par les élus et la commission nautique instaurée pour étudier le développement des ports de la Régence.

Les travaux du nouveau port de Sousse décidés dès 1891 nécessitèrent la construction d’épis et de jetées renforcées pour protéger la rade. Pierres et blocs de terre furent acheminés de Takrouna et d’Enfidha ville mais aussi de Hergla et de Bou Jaafar. Les travaux durèrent jusqu’en 1898-1899. A terme, jetées, épis, quais et digues nouvelles permettaient de dégager un vaste bassin représentant la fin des opérations en 1899. La question du port aura alimenté les débats et les inquiétudes de 1888 à 1896. Le port de Sousse achevé après celui de Tunis allait permettre avec le chemin de fer de renforcer la place économique et industrielle de Sousse dans son territoire élargi au Sahel et au Centre de la Tunisie.23

4.2.2. La construction de la ville neuve 1894-1904

« …. Forcée de s’agrandir, étouffant dans le cercle des murailles qui l’entourent, mal à l’aise pour son commerce, son industrie dans les rues étroites et tortueuses de la ville arabe, Sousse européenne sortit des fortifications et , au hasard d’abord, sans ordre, sans plan premier établi, des maisons s’édifièrent sur le terrain conquis sur la mer, en face de la porte et la place de France qui représentait le quartier select de la ville….. ». 24

Ainsi s’exprime le journal l’Avenir de Sousse en 1904, mettant en relief le caractère relativement précipité et aléatoire des débuts de la ville neuve européenne. En effet, après avoir été cantonnée au triangle compris entre l’avenue de la Quarantaine et le Cours de la Marine jusqu’en 1900, la ville neuve peut après cette date s’appuyer sur les nouveaux tracés est du Boulevard Emile Loubet et du Boulevard Armand Fallières face au port qui constituent un appel à l’urbanisation à l’est et au sud sur la route de Monastir .25

Pour l’heure, l’année 1894 est celle qui voit l’élargissement du périmètre de la ville26 approuvé par le conseil municipal, qui vient prendre acte des nécessités démographiques et urbaines pour assurer le développement de la ville neuve. Cet élargissement du périmètre communal englobe les cimetières préexistants au nord et au sud, la plage de Bou Jaafar au nord, les terrains situés à l’ouest du camp militaire, les terrains situés sur la route de Monastir (futur Boulevard Emile Loubet prolongé sur les quais). Entre 1885 et 1894, la population de la ville a quasiment doublé. Celle-ci compte en 1894, 16379 habitants dont 9173 musulmans, 3000 italiens, 2700 juifs, 806 français et 700 maltais accentuant jour après jour le caractère cosmopolite et multiculturel de la ville.27 La population européenne s’est installée extramuros autour du port et de la Place Pichon laissant aux juifs et aux maltais les bas quartiers de la médina où ils sont logés dans les rues de Malte, de France, Logerot et d’Angleterre. Au sud de la place Jabbanat al Ghorba est apparu à proximité des quais le quartier Sicilien de Capacci Piccolo autour des rues étroites de Trapani, de Rome et de Messine. L’autre pôle de la ville neuve est constitué au nord sur la route de Tunis par le quartier de la gare inaugurée en 1896. Ainsi, la ville neuve se développe -t- elle à partir des infrastructures liée à la communication et au transport , chemin de fer et port , grands tracés, routes et pistes menant aux villes voisines de Monastir, Mahdia, et à celles de Sfax et Gabès. Et si effectivement il n’y a pas eu de plan général établi pour la ville neuve dès 1885, on peut dire que la croissance urbaine de la ville européenne s’est faite en fonction des limites de la ville ancienne et des pôles neufs constitués par les boulevards de ceinture et les infrastructures. Entre 1894 et 1904, la ville neuve s’équipe de nouveaux bâtiments tel l’hôtel des Postes et Télégraphes, le Musée et Cercle Militaire, le Casino municipal, le Palais de Justice. Tandis que l’on songe à trouver un nouvel emplacement sur les quais extramuros à l’Hôtel de Ville qui continue de siéger dans la médina à l’angle des rues de Malte et d’Angleterre. Dans l’ancien quartier de la Quarantaine et de la Marine des rues Villedon, Jules Ferry et du Cours de la Marine, l’activité battait son plein. Marché couvert, Hôtels, Brasseries, commerces divers en animaient les rues. L’avenue de la Quarantaine renommée en 1904 avenue Krantz du nom du Ministre des Travaux Publics restait l’une des focales de la ville et par son ancienneté drainait institutions, Ecoles, Prison, et immeubles de commerce et d’habitation. A proximité du quartier de la Quarantaine s’édifiait en 1896 la Gare du chemin de fer de Sousse à Tunis desservie par le boulevard René Millet. Une place en demicercle ouvrait le bâtiment de la gare vers les autres rues rayonnantes dans les directions est ouest et nord. Le boulevard René Millet conduisait à l’édification de nouveaux espaces et rejoignait le quartier Nord du Trocadéro et de Capacci Grande où sera édifiée plus tard l’église Saint Félix (1914) venue soulager l’église Notre-Dame devenue trop étroite pour la communauté chrétienne grandissante.28 Entre le quartier de la gare et la vieille ville à Bab Bhar, se tiennent les restes des terrains du grand cimetière musulman qui n’a toujours pas été déclassé et qui sert essentiellement à l’inhumation des étrangers sans descendance (al Ghorba)…. « …En plein centre de la ville actuelle , enserré entre les fortifications de la vieille cité arabe et les quartiers nouveaux bâtis à l’européenne, se trouve ce qui reste de ce cimetière musulman qui s’étendait du rivage de la mer au sommet de la colline que couronnent aujourd’hui les villas du Trocadéro, le bordj d’artillerie et le camp militaire …. ». Les voix s’élèvent pour réclamer le déclassement des parcelles du cimetière et sa requalification foncière au profit de la ville européenne. Finalement le cimetière ne sera déclassé qu’en 1910 ouvrant par de nouveaux terrains à l’édification de la ville neuve.29 Ainsi le terrain et les éléments préexistants ont conditionné le développement de la ville neuve et l’on comprend que l’obstacle du grand cimetière musulman ait conduit dans un premier temps la ville neuve à s’installer sur les bords humides de Bhar Azzibla et de la Quarantaine. 30Mais il est un autre obstacle qui grève le développement de la ville européenne c’est la question de son déclassement en tant que zone et ville de servitude militaire. Ainsi le Génie militaire s’oppose-til au Conseil Municipal et n’accèdera finalement à la demande de déclassement qu’en 1922.

« ….Les constructions élevées sur ces lots devront être établies de telle façon qu’aucun point de leur maçonnerie ne dépasse l’altitude de dix mètres au-dessus du niveau du trottoir bordant les constructions. Toute contravention exposerait son auteur aux poursuites de l’Autorité militaire ainsi qu’à une action de la part de la Compagnie des Ports ».31Malgré ces limitations, la ville neuve de Sousse continuera de s’étendre et de se couvrir d’immeubles de rapport et des premières villas du quartier du Trocadéro dès 1900.

Tandis que la médina et ses institutions perdurent, qu’elle demeure habitée par de nombreux juifs et maltais et qu’elle reste un centre vivant de commerce et de traditions ancestrales, la ville neuve dans les années 1900 est au seuil d’une nouvelle transformation impulsée par les activités du nouveau port et la liaison du chemin de fer Sousse-Tunis. Sa population augmente. Sousse est en 1904 une ville de 21000 habitants dont 10.900 Musulmans 1.600 Français, 5.000 autres Européens surtout Italiens et Maltais et 3.500 Israélites. Elle est le siège d’un contrôle civil de 260.000 habitants répartis dans les agglomérations et villages voisins.32 Elle a notoirement évolué depuis les premiers tracés de la Quarantaine et des batteries du môle nord et sud. Son nouveau port opérationnel dès 1896 et sa liaison par chemin de fer à la capitale et aux villes voisines en font une place centrale rayonnante dans la région du Sahel, du centre et du sud de la Régence.

Fig. 10. Ville de Sousse en 1899, échelle du document original 1/5000°, d’après le plan de la Ville de Sousse en 1899 établi par le Service des Travaux de la Ville , Source : A.N.T , série M3, FPC/M3/0007/0135, cartographie, L. Ammar, 2011.

Fig. 11. Plan de la ville de Sousse en 1903, d’après les Guides Joanne, 1904, Hachette et Cie. Ce plan nous donne à voir l’état des lieux de la ville de Sousse en 1903, de son réseau viaire intra et extra muros, de la toponymie des voies, des grandes infrastructures réalisées et des espaces encore vierges.

Conclusion

S’intéresser à la ville de Sousse durant la fin du XIXème siècle et le début du XXème siècle est porteur d’enseignements et d’éclairages sur l’histoire de l’armature urbaine des villes de la Régence à cette période. Notre propos a été ici de tenter de retracer les transformations de la ville de Sousse de 1884 à 1904. Deux dates repères marquant d’une part l’institutionnalisation de la nouvelle municipalité et commune et d’autre part le début d’une expansion de la ville neuve européenne libérée de ses entraves.

Certes, la ville neuve de Sousse n’a pas connu de plan générateur global et unifié et s’est imprimée dans l’espace à partir d’une détermination topographique évidente liée à la préexistence du site et à la prééminence de la ville ancienne. Néanmoins, cette ville neuve qui dans ses débuts a emprunté les parcours et s’est tenue dans les édifices remarquables de la Médina s’est affirmée progressivement à l’encontre des valeurs ancestrales et sur des terrains conquis sur la mer ou sur d’anciens cimetières.

L’histoire de la ville de Sousse de 1884 à 1904 est celle du renouvellement urbain et de la confrontation entre deux systèmes de valeurs. Le premier lié à la permanence et à la pérennité des institutions préexistantes, le second marqué par la modernité coloniale et son prisme hygiéniste et ordonnateur d’une nouvelle pensée sur l’espace urbain. Sousse, ville secondaire et en même temps plaque tournante de la région du centre et du sud de la Régence, aura connu en l’espace de vingt années des transformations décisives au plan urbain et architectural. Transformations soulignées par la lenteur des réalisations, le caractère aléatoire et complexe des mécanismes de production, le rôle prépondérant de Tunis comme centre de décision.

Au travers de notre investigation, nous avons pu approcher le rôle des acteurs municipaux et des différentes communautés dans la construction de l’espace neuf de la ville. Sousse, ville européenne moderne et coquette, est appelée par les vœux des élus des différents conseils municipaux à majorité européenne. Elle verra le jour au terme de vingt années d’atermoiements et de lenteurs qui consacreront l’avènement du changement de statut de l’espace urbain, la prééminence des valeurs modernes d’hygiène, de salubrité et de circulation ainsi que les nouvelles notions de loisirs et de confort urbain.En 1904, la ville ancienne existe et perdure comme un contrepoint actif et valorisé à la ville neuve. Elle est le creuset et le noyau où se tiennent activités et usages ancestraux.

Dans les espaces de proximité avec la ville neuve, elle laisse transpirer confrontations et accommodements. Ainsi, la place Bab Bahr ouverte dans le rempart répond à la porte de France nouvellement nommée. La ville ancienne finit par s’ouvrir malgré ses résistances, le long d’artères régularisées renommées et d’édifices réquisitionnés. La Médina de Sousse conservera une valeur de contrepoint et de centre économique important jusqu’aux années 1920 où elle sera alors supplantée par la ville neuve. Dans cette histoire du renouvellement urbain de la ville de Sousse à partir de la fin du XIXème siècle, nous pouvons enfin souligner la complexité et l’imbrication du rôle des acteurs institutionnels et privés ainsi que celles des médiateurs qui ont permis l’avènement d’une ville neuve moderne.

Dans cette recherche, nous nous sommes appuyés essentiellement sur la lecture des sources archivistiques disponibles qui a été déterminante et sur l’interprétation du terrain. Nous espérons en avoir fait ici la démonstration.

Chronologie sommaire : Sousse, 1881-1910

1881 : Etablissement du protectorat français, Sousse deuxième ville du Royaume, est une zone de servitude militaire, elle le restera jusqu’en 1922, en 1881 elle compte 8600 habitants.
1882 : Etablissement d’un camp militaire à l’ouest de la médina sur une esplanade de plus de 30 hectares, avec baraquements, hôpital et garnisons.
1884 : Création de la commune de Soussa (Sousse). Périmètre communal 32 ha équivalent à la vieille ville inscrite dans un quadrilatère de 460 m x 700 m.
1884 : 25 juillet, premier conseil municipal.
1885 : 12 décembre, Décret émanant du Génie militaire interdisant toute construction dans un rayon de 250 mètres autour des Remparts et n’autorisant que 10 mètres de hauteur sur le front de mer.
1888 : Approbation du Règlement municipal de voirie du 2 octobre 1888 pour la ville de Sousse.
1889 : Construction d’un marché public couvert aux abords de Bab Bhar.
1889 : Projet de chemin de fer Tunis-Sousse avec embranchements sur Kairouan, Nabeul Zaghouan.
1890 : Loi douanière sur le commerce et l’industrie pour le Sahel.
1890 : Transfert de la municipalité à la rue du Général Riu dans le Dâr Ismac il (intramuros)
1890-1895 : Ouverture de trois nouvelles portes dans l’enceinte de la vieille ville Bab al-Jibli, Bab al-Qibli, Bab al-Finga. Démolition du rempart Est entre Bab Bhar et Bab Jdid.
1890 : Mise en service d’une ligne de Chemin de fer de Sousse à Kairouan (la gare est implantée sur l’avenue de la Quarantaine).
1890 : Création de la Compagnie des ports de Tunis, Sousse et Sfax.
1888- 1903 : Tracé de l’avenue de la Quarantaine et des rues adjacentes, naissance de la ville neuve.
1892 : Début des travaux du nouveau port de Sousse par l’établissement d’une nouvelle grande jetée, le quai principal est porté à 300 mètres de long.
1892 : Début des travaux du chemin de fer Sousse-Tunis par le tronçon Sousse-Enfidha.
1894 : Fermeture partielle du cimetière musulman nord à Bab al-Jibli.
1896 : Mise en service du Chemin de fer de Sousse à Tunis, déplacement de la gare.
1896 : Création d’un hôpital civil à Sousse régional au nord sur la route de Sidi Boujaafar.
1898 : Inauguration du Port de Sousse par Krantz, ministre des Travaux publics français et Millet, résident général, bassin 28 ha, 500 m de quais, 6,5 m de profondeur.
1898 : Mise en service des lignes de chemin de fer de Sousse à Kairouan et de Sousse à Moknine.
1895-1905 : Naissance et développement des quartiers Siciliens Capacci Piccolo, Capacci Grande.
1904 : La ville de Sousse compte 21.000 habitants.
1906 : Mise en service d’un réseau d’éclairage à l’électricité dans toute la ville.
1910 : Prolongement de l’avenue Krantz, le long de la plage nord de Sidi Boujaafar.
1910 : Travaux de viabilité et de salubrité dans la médina de Sousse.
1907-1908 : Approbation du plan général d’assainissement de la ville et début des travaux.
1910-1911 : Construction du nouvel l’Hôtel de Ville en face du port sur le boulevard Armand Fallières

Notes

1 Ces boulevards sommairement tracés et plantés sont destinés à séparer la ville ancienne de la ville neuve et à faciliter le déplacement des convois militaires. Ils seront réalisés de 1885 à 1890.
2 Ameur Baaziz (2005), Serge Santelli (1986), Anouar El Fani, Ali Zormati, Hédhili Chaouache, Hassen Ben Said, (1984), Ali Noureddine (1989), Kamel Jerfel (2001), Afef Ghannouchi (2011).
4 Règlement de voirie de la ville de Sousse du 2 octobre 1888.
5 Direction de l’occupation de Tunisie, subdivision de Sousse, Territoire du Sahel, Ville de Sousse. Ministère de la Défense, Etat-major de l’armée, 7 octobre 1885. Mémoire du Capitaine officier de renseignements de la direction de l’occupation. Copie conservée à la bibliothèque de l’association culturelle de Sidi Yahia, Sousse.
6 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 23 mai 1890, « Réorganisation de la municipalité de Sousse », p. 1.
7 Serge Santelli, 1986, p. 67-73.
8 La ligne Kairouan-Sousse possédait des wagons tractés par des chevaux puis par des locomotives à vapeur. A partir de la gare la ligne traversait l’esplanade est en face du vieux port.
9 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 25 janvier 1889, n° 40, p. 2.
10 Ce sont notamment les rues de Jules Ferry, Gambetta Villedon, Pasteur, Massicault, Moscou. Ces rues projetées et réalisées entre 1890 et 1895 se situent sur des terrains conquis sur les sables et la mer au lieu-dit Ardh Bhar Ezzibla
11 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 30 mai 1891, « La démolition des remparts est de la ville », p .1 ; 20 novembre 1891, « Travaux publics », p. 2 ; 23 juillet 1892, « La promenade de la Marine », p. 2 ; 20 août 1893, « Voirie municipale », p. 2 ; 23 avril 1893, « La Place de la Marine », p. 2.
12 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 20 août 1893, n° 262, p. 2.
13 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 23 avril 1893, n° 219, p. 2.
14 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 23 juillet 1893, n° 260, « Le budget municipal », p. 3.
15 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 30 mai 1891, « La démolition des remparts est de la ville » , p. 1 ; 25 novembre 1900, p. 1.
16 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 2 novembre 1894, « Voirie municipale », p. 2.
17 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 24 décembre 1894, « Le nouveau périmètre de la ville », p. 2.
18 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 2, janvier 1892, « Budget municipal », p. 1.
19 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 12 juillet 1892, « Fleurs de Sousse », p. 2 ; 24 décembre 1894, « Les Egouts », p. 2.
20 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 12 juillet 1892, p. 2
21 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 17 janvier 1891, « Le Sahel et la question des chemins de fer », p. 1.
22 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 5 avril 1889, « Le projet de chemin de fer Tunis-Sousse, avec embranchements sur Kairouan, Nabeul et Zaghouan », p. 1.
23 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 24 mars 1901, « Sousse, port de sortie des Phosphates de l’Ouest et du Centre Tunisiens », p. 1 ; 11 mars 1896, « Le Port de Sousse », p. 1.
24 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 12 juin 1904, « Les Odeurs de Sousse », p. 1.
25 Les boulevards Emile Loubet et Armand Fallières résultent de la démolition partielle du rempart est et de l’aménagement d’une vaste esplanade face au nouveau port inauguré en 1896.
26 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 12 juillet 1892, « Fleurs de Sousse », p. 2 ; 24 décembre 1894, p. 2.
27 L. Aubert, 1885, p. 545-555.
28 L’église Notre-Dame se tenait depuis 1885 dans la médina à l’angle des rues de Malte et de l’Eglise à proximité de la Grande Mosquée.
29 A.N.T., L’Avenir du Centre, Organe hebdomadaire des Intérêts politiques et économiques des régions de Sousse et le Sahel-Kairouan et Thala, 18 juin 1909, n° 205, « Le cimetière musulman de Sousse », p. 1
30 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 25 novembre 1900, n° 567, « Sousse future », p. 1.
31 A.N.T., L’Avenir de Sousse, organe spécial des intérêts agricoles, industriels et commerciaux du Sahel, 25 novembre 1900, n° 567, « Sousse future », p. 1.
32 Guides Joanne, 1905, p. 366-370.

Bibliographie

Sources

Archives Nationales de Tunisie, « L’Avenir de Sousse, organe des intérêts politiques et économiques du Sahel », 1888-1905. (Sans cote)
Archives Nationales de Tunisie, Plan de la ville de Sousse édité par le Service des Travaux de la Ville en 1899, série M3, Sousse, FPC/M3/0007/0135.
Archives municipales, Plan de l’Avenue de la Quarantaine 1888, Sousse.
« Mémoire du capitaine officier de renseignements de la Direction de l’Occupation, 7, octobre 1885 », Direction de l’occupation de Tunisie, Subdivision de Sousse, Territoire du Sahel, Ministère de la Défense, Etat-major de l’armée, octobre 1885, Bibliothèque de l’Association culturelle de Sidi Yahiya, Sousse.
Guides Joanne, Algérie Tunisie, 1885, 1905, 1910, Paris, Hachette et Cie.

Références bibliographiques

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Sites Internet

http://www.sousse1881-1956.com/accueil/accueil.htm
www.tunisie-cpa-1900.net

Auteur

Leïla Ammar

Maître de Conférences - Université de Carthage, Laboratoire d’Archéologie et d’Architecture MaghrébinesUniversité de la Manouba.

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