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10 | 2020

De la colline « magnifiquement orientée » au « meuble effacé dans le mur ».
La formule hygiéniste du logement moderne à l’épreuve du contexte. Tunis 1943

Narjes Ben Abdelghani

Résumé

Tunisie 1943. A l’occasion de sa reconstruction au lendemain de la deuxième guerre mondiale, le pays bénéficie d’un ambitieux programme de logement où la question de l’hygiène est centrale conformément à la référence moderne des architectes de la reconstruction. En s’appuyant sur les leçons du mythique texte de la charte d’Athènes, ces derniers ont l’occasion d’appliquer dans les nouveaux quartiers d’El Menzah les dispositifs spatiaux prototypiques que l’avant-garde moderne européenne de l’entre-deux guerres réunie dans le cadre des CIAM (Congrès Internationaux d’Architecture Moderne) met en place et diffuse dans le monde.

Les textes laissés par les reconstructeurs tunisiens dans les archives montrent qu’aussi bien ces formes construites dans l’espace que les idées qui les habitent font le voyage à Tunis. Il convient alors d’observer sous l’angle hygiéniste, comment s’opère ce transfert d’un modèle à la fois urbain et architectural.

Dans les lignes qui suivent, nous essayerons de restituer les idées hygiénistes qui donnent corps à ces formes inventées en Europe et implantées sur le territoire tunisien d’une part et d’observer comment le contexte les façonne d’autre part.

Diachronique, cette lecture que nous engageons gagne aussi à replacer l’expérience tunisienne dans l’histoire générale d’un modèle qui, en se voulant universel, marque considérablement la pensée et la pratique architecturales dans le monde, qui est tantôt perpétué à travers certains de ses attributs, tantôt remis en cause et réajusté en fonction des problématiques qui se renouvellent à chaque époque.

Mots clés

Politique du logement, Architecture hygiéniste, Tunisie, El Menzah, Architecture moderne, architectes de la Reconstruction.

Abstract

From the "perfectly oriented" hill to "the hidden furniture in the wall ". The hygienist formula of modern housing facing the context. Tunis 1943.

Following world war II damages, an ambitious housing program has been undertaken during the reconstruction of Tunisia where hygiene was an important issue in accordance with the modern reference of the “architects of reconstruction”. Referring to the lessons of the mythical text of “ la charte d’Athènes” they had the opportunity to apply in El Menzah the prototypical spatial devices that modern avant-garde of the interwar period united within CIAM set up and disseminated in the world. The words left by the Tunisian reconstuctors in the archives show that both these forms constructed in space and the ideas that inhabit them made the trip to Tunis. In that regard, it is interesting to observe from a hygienic perspective, how this transfer of that architectural and urban model takes place. In this paper, we will try to restore the hygienist ideas embodied in these forms invented in Europe and established in Tunisia on the one hand and to observe how the context shapes them on the other hand.

Diachronic, this reading seeks to place the Tunisian experience in the general history of a modern model which, by wanting to be universal, considerably marks architectural thought and practice in the world. A model which is sometimes perpetuated through some of its attributes, sometimes called into question and readjusted according to the issues that are renewed in each era.

Keywords

Housing policy, Hygienic architecture, Tunisia, El Menzah, Modern architecture, architects of Reconstruction.

الملخّص

من "التل ذو الوجهة المثالية" إلى "الخزانة المخبأة في الحائط". الصيغة الصحية لمسكن الحداثة في السياق التونسي 1943.

تونس1943. على إثر خسائر الحرب العالمية الثانية استفادت البلاد من برنامج إسكان طموح, كانت المسألة الصحية جوهرية فيه وذلك وفقا لمعايير النموذج الحداثي الذي مثل مرجعا رئيسيا للمعماريين المكلفين بإعادة إعمار تونس. أتاحت أحياء المنزه السكنية الجديدة فرصة لهؤلاء المعماريين لتطبيق التشكيلات المكانية النمطية التي وضعتها و نشرتها في العالم مجموعة المعماريين الحداثيين المجتمعة في نطاق مؤتمرات العمارة الحديثة الدولية (CIAM )وقد إعتمدوا في ذلك على النص الأسطوري لميثاق أثينا (charte d’Athènes).

يتجلى لنا من خلال نصوص الأرشيف التي تركها المعماريون المكلفون بإعادة إعمار تونس أن كلا من هذه التشكيلات المكانية و الأفكار التي تسكنها تسافر إلى تونس فيكون من المثير للإهتمام ان نتبين كيف يحدث نقل النموذج الحداثي الذي يجمع بين العمارة و التخطيط المعماري من خلال المنظور الصحي بالخصوص.

نطمح إذا من خلال هذا المقال إلى تجميع الأفكار المتعلقة بالمفهوم الصحي التي تتجسد في تشكيلات نمطية تم إختراعها في أوروبا ثم إنشاؤها في سياق تونسي يعيد تشكيلها.

القراءة المعتمدة هنا تتنقل بين أزمنة مختلفة فتضع التجربة التونسية في إطار التاريخ العام لنموذج حداثي طمح للكونية فكان له أثر كبير على الفكر والممارسة في مجالي العمارة والمعمار في العالم. نموذج يتواصل الإحتذاء ببعض عناصره أحيانا و يطوله النقد أحيانا كثيرة فيعدل وفق الإشكاليات المتجددة عبر الزمان.

الكلمات المفاتيح

سياسة الإسكان ، العمارة الصحية ، تونس ، المنزه ، العمارة الحديثة ، مهندسو إعادة الإعمار.

Pour citer cet article

Ben Abdelghani Narjes, « De la colline « magnifiquement orientée » au « meuble effacé dans le mur ». La formule hygiéniste du logement moderne à l’épreuve du contexte. Tunis 1943 », Al-Sabîl : Revue d’Histoire, d’Archéologie et d’Architecture Maghrébines [En ligne], n°10, Année 2020.

URL : https://al-sabil.tn/?p=18988

Texte integral

Introduction

Il arrive au cours de l’histoire, que certaines idées acquièrent une hégémonie telle qu’elles finissent par conditionner considérablement le cadre bâti des hommes. L’hygiène, comme idée existe incontestablement à travers les établissements que façonnent intelligemment différents groupes humains en Tunisie à travers les époques et dans le sillage des civilisations qui s’y succèdent. Elle va cependant se manifester à partir des années quarante comme un des fondements du modèle envahissant de la modernité architecturale devenu incontournable au lendemain de la deuxième guerre mondiale.

Pour faire renaître la Tunisie sinistrée de ses cendres, l’administration coloniale française avait mis tous ses espoirs dans ces nouveaux outils aux intonations thérapeutiques : Architecture et urbanismes modernes ! qui croyait-on fermement à l’époque, représentaient l’ultime voie vers le progrès. Ils auraient ainsi permis de mettre de l’ordre dans les villes, de perfectionner leur fonctionnement en les adaptant aux temps machinistes et de proposer à l’homme moderne et forcément « universel » la recette d’une nouvelle architecture rationnelle sortie tout droit des laboratoires d’une avant-garde européenne de l’entre-deux-guerres, réunie dans le cadre des CIAM (Congrès Internationaux d’Architecture Moderne) et synthétisant sa pensée sur la ville dans le texte mythique de la charte d’Athènes.

Les archives nous révèlent que fidèlement à leur référence moderne, une idéologie hygiéniste avait occupé une place centrale dans la « doctrine » de l’équipe de la reconstruction, administration et architectes.

Comme dans leur référence moderne aussi, les dispositifs spatiaux canonisés par cette avant-garde européenne et censés concrétiser dans l’espace les valeurs qu’elle défendait, avaient été reconduits systématiquement par les architectes de la reconstruction sur ce territoire nord-africain lorsqu’il s’agissait d’habitat de « type européen »1.

1. L’hygiène pour tous les habitants de la Tunisie

Si, pour les reconstructeurs, l’hygiène avait été une grande préoccupation à en juger de la redondance du mot dans leurs discours, cette préoccupation avait été particulièrement prépondérante dans la politique du logement engagée dans le cadre du programme de reconstruction, car il fallait tout d’abord promettre la santé à tout habitant de la Tunisie nouvelle. Pourquoi ?

Dans la doctrine de la reconstruction, l’idée de la relève économique du pays au lendemain de la guerre est inextricablement liée au rendement des travailleurs, lui-même tributaire de la qualité de leur lieu de vie. Que ceux-ci fassent partie d’une classe moyenne représentée par les fonctionnaires, les professions libérales ou les commerçants ou qu’ils soient ouvriers, ils représentent selon les mots consignés dans cette doctrine2 un « précieux potentiel humain » dont l'effort est indispensable pour « remettre en route l'activité productrice du pays ». Il faut donc lui assurer « un agrément d'existence suffisante » qui permette de développer sa « santé », « son énergie » et par conséquent, « sa capacité et sa continuité d'effort ».

Pour les reconstructeurs, le lieu de vie devient un catalyseur de la productivité des travailleurs car il leur garantit un bien-être dont un des fondements est la santé. S’impose alors forcément cette deuxième idée : pour tous, cette hygiène est promise. Depuis les premiers textes rédigés dans le cadre de cette doctrine, les mots écrits en majuscule soulignent cette conviction : « ZONES D’HABITATION : Conditions fondamentales obligatoires pour la répartition et l’aménagement des lieux habités : a/ Situation HYGIENIQUE DE TOUTES LES PARTIES de la ville ; b/ Certain MINIMUM SANITAIRE ET HYGIENIQUE, dans l’organisation du territoire et l’édification du lieu habité, EGAL, autant que possible pour tous les lieux d’habitations »3.

Résonne ici au même moment, l’idée d’une égalité dont il faudrait chercher l’origine dans les idéaux humanistes qui fondent le modèle moderne de la maison pour tous et que défendent à leur tour les reconstructeurs en l’adaptant tant bien que mal à la condition coloniale de la Tunisie.

Pour saisir cette idée d’égalité associée à la salubrité du lieu de vie qui prendra corps dans la production des reconstructeurs, il ne faudrait pas faire l’économie d’un retour au texte de la charte d’Athènes qui avait constitué pour eux une référence de premier ordre. Un texte à considérer comme le condensé d’une pensée collective qui apporte des réponses aux grands bouleversements provoqués par la révolution industrielle dans les villes européennes mais aussi comme le prolongement d’une pensée hygiéniste qui ne se détache plus de la pratique architecturale depuis le XIXe siècle.

Porte-parole éloquent de l’avant-garde réunie depuis les années 20 pour penser au renouveau des villes européennes, Le Corbusier y avait dénoncé « une répartition partiale de l’habitation »4 en comparant ce qu’il qualifie de « quartiers ouvriers » aux « quartiers aisés ». Il explique : « Certains édiles, hélas ! trouveront naturel d’assigner à l’édification d’un quartier ouvrier une zone jusque-là négligée parce que les brouillards l’envahissent, parce que l’humidité en est excessive ou parce que les moustiques y pullulent […] il estimera qu’un versant nord qui n’a, par suite de son exposition, jamais attiré personne, qu’un terrain empoisonné par les suies, les fumerons, les gaz délétères de quelque industrie, parfois bruyante, sera toujours bon pour y faire camper les populations […] qu’on appelle la main d’œuvre courante »5. « Les constructions aérées des habitations aisées » occupent quant à elles « les zones favorisées, à l’abri des vents hostiles, assurées de vues et de dégagements gracieux sur des perspectives paysagistes [...] et d’une insolation abondante »6.

Le zonage qui apparaît aujourd’hui comme un outil controversé ayant montré ses limites dans la planification urbaine avait été donc présenté à l’époque comme un moyen, le moyen que les congressistes des CIAM avaient trouvé pour « sanctionner » cette « répartition partiale de l’habitation ». De nouveaux quartiers d’habitation sont ainsi à créer dans des secteurs spécifiques favorablement implantés, indépendants des secteurs industriels et même séparés d’eux par une
« zone de verdure » pour une « vie saine et ordonnée »7 accessible à tous.

C’est cette principale décision à l’échelle de la ville qui conditionnera la production institutionnelle du logement de masse depuis la moitié du XXe siècle. Elle permettra au même moment d’appliquer tout un arsenal de dispositifs hygiénistes inédits qui se déploient de l’échelle de la ville jusqu’à l’échelle de l’équipement de la maison.

Construits sur les terrains vierges d’un espace péri-urbain destiné aux nouvelles banlieues, les nouveaux quartiers d’habitation pouvaient être, en effet, pensés librement des contraintes des tissus urbains existants et constituer après la guerre un véritable banc d’essai des inventions urbanistiques et architecturales canonisées et démontrées depuis les années 20, notamment en Allemagne.

2. Les quartiers El Menzah : la démonstration de la formule moderne

A sa Sortie de la guerre, la Tunisie des années quarante, représentait bel et bien ce banc d’essai d’une reconstruction basée sur les leçons de la charte d’Athènes qui pouvait inspirer la reconstruction de la France non encore libérée.

« J’avais pendant la guerre, en sortant de l’école […] eu connaissance et seulement à ce moment-là des livres de Le Corbusier, et je m’étais imprégné de toutes ses idées de l’urbanisme confie Bernard Zehrfuss le chef de file de la première équipe des reconstructeurs tunisiens, […] c’était pour moi une révélation assez étonnante, assez frappante, […] donc je m’étais imprégné de ça et il est évident que aussitôt on avait une occasion, surtout en faisant ces plans d’urbanisme,[…] d’appliquer quelques-uns des principes de Le Corbusier8. Il était impossible au début de notre action d’appliquer rigoureusement la doctrine de la charte d’Athènes, dont pourtant, mes collaborateurs et moi-même sommes convaincus. L’important était d’abord d’introduire quelques-unes des idées essentielles et surtout de les réaliser »9. Il précisera : « Faire appliquer quelques principes essentiels d’urbanisme et d’architecture, tels que la réduction des voieries, le maintien et l’aménagement d’espaces libres plantés, la bonne orientation, l’ensoleillement et la ventilation »10.

L’ambitieux projet de la nouvelle ville de Zarzouna qui aurait représenté la démonstration parfaite, étant avorté11, de tous les quartiers d’habitation projetés par les reconstructeurs dans les grandes villes de la Tunisie, c’est à Tunis, à El Menzah que la première démonstration prendra corps dans l’espace avant la fin de l’ère coloniale. Il n’est donc pas surprenant que le nouveau quartier d’El Menzah I établi sur des terres expropriées, considérées dès lors comme « terrains vierges entièrement acquis par l’Etat »12 soit illustré à maintes reprises, dans la revue AA (L’Architecture d’Aujourd’hui), l’un des principaux organes de propagande des idées modernes défendues par les congressistes des CIAM.

Achevé en 1953, ce premier « groupe d’habitation », c’est-à-dire l’unité élémentaire dans un chapelet de quartiers autonomes13, est défini par Michel Deloge dans le numéro 60 de AA comme étant une « opération de lotissement-pilote », faisant ainsi écho à ce commentaire de Françis Jerrold sept ans auparavant dans le numéro 20 de la même revue qui présente l’ensemble de la cité de Crémieuxville (la première appellation de ce chapelet de quartiers d’El Menzah) comme une cité qui « constitue un maillon de la chaine des zones résidentielles de demain qui ceintureront l’ancienne ville »14.

Dans cette opération se voulant exemplaire, sera alors appliquée fidèlement la formule d’un logement moderne qui se pense de manière globale, depuis la ville jusqu’au mobilier de chaque pièce, fidèlement à l’approche de l’avant-garde moderne selon laquelle l’architecture et l’urbanisme sont les deux faces indissociables d’une même réalité15. Dans cet emboîtement d’échelles de conception, peut être observé le fondement hygiéniste qui habite des formes prototypiques instaurées depuis l’espace urbain de Tunis jusqu’à l’espace privé de chaque chambre dans un des appartements d’El Menzah I.

3. A l’échelle de la ville : question d’implantation, la maison accrochée au flanc de la colline ensoleillée

El Menzah 194316. Nos architectes de la reconstruction cherchent explicitement à introduire autant que possible les dispositifs prototypiques modernes qui manifestent dans l’espace les idées que canonise et vulgarise la charte d’Athènes.

Il est indéniable que, pour eux aussi, la maison, toute maison, se pense bien au-delà de son périmètre domestique propre à la famille et avant tout à l’échelle de la ville. En empruntant l’instrument athénien, ils commencent ainsi par opérer un zonage qui permettra selon eux de réserver à l’habitation des « emplacements particulièrement propices »17. Ainsi, le centre de Tunis sera consacré zone de travail, alors que de nouveaux quartiers d’habitations seront créés dans des zones plus salubres qui le ceinturent.

D'une manière générale, leur rapport sur l’orientation des études de l’urbanisme résume la situation à leur arrivée en Tunisie en ces termes « L’hygiène de la ville est déplorable. Des quartiers entiers sont d’une insalubrité extrême. Toute la partie des nouveaux quartiers construite sur des terrains plats récupérés sur le lac, présente de grandes lacunes, et certaines zones sont transformées en véritables cloaques »18.

Ainsi dénonçant fermement les zones d’habitation qu’ils découvrent et qui « fonctionnent dans de détestables conditions hygiéniques et climatiques », voici habitations proprement dites en dehors du périmètre actuel de la ville, en créant des agglomérations satellites aux endroits favorables»19 .

Cette décision renvoie automatiquement au 24e postulat de la charte : « la détermination des zones d’habitation doit être dictée par des raisons d’hygiène »20. Qu’est-ce donc ce terme emprunté à la charte « emplacement favorable » d’un point de vue hygiéniste ? C’est celui qui permet de « tirer parti de la topographie et du climat » et de « disposer de l’ensoleillement le plus favorable » et des « surfaces vertes »21 peut-on y lire.

En réalité, les enseignements de la charte ne sont pas sans coïncider avec l’implantation judicieuse des villes anciennes que découvre l’équipe de la reconstruction en Tunisie et Françis Jerrold, premier urbaniste en charge du plan d’aménagement de Tunis aux côtés de Bernard Zehrfuss, ne manque pas à cet effet de remarquer22 : « à l’origine, Tunis était une ville fortifiée admirablement placée sur une hauteur très dégagée ». Il nous livre ainsi ce schéma du relief de Tunis où « une série de collines bien orientées émergent de la plaine et de marécages » explique-t-il pour introduire l’approche des reconstructeurs qui réactive d’une certaine manière la leçon du passé. (fig.1).

L’idée est formulée dans le numéro spécial de AA « Urbanisme » qui relate plusieurs expériences de planification urbaines dans le monde. Il y écrit au sujet de Tunis : « en profitant du site, ceinturé du nord-est au sud-ouest par une chaîne de collines, le plan directeur délimite dix-sept zones résidentielles suburbaines d’extension satisfaisant aux conditions d’altitude, d’orientation, de ventilation et de vue »23.

Lui succédant, après avoir fait partie du premier groupe chargé de l’aménagement de Tunis dans les premières années de la reconstruction, Michel Deloge, montre à travers ses publications successives qui apportent un éclairage précieux sur l’aménagement de Tunis et de ses collectivités dans les dernières années de la colonisation française24, que cette préoccupation hygiéniste reste primordiale pour le choix des nouveaux quartiers d’habitation. Il nous livre ainsi l’inventaire des lieux propices à la construction des nouvelles cités satellites, « ce sont donc principalement les pentes des collines orientées au S-E et au Sud qui ont été retenues »25 écrivait-il.

          - « Au Nord de Tunis, les pentes des coteaux qui s’étendent depuis le Belvédère jusqu’à la hauteur de l’Ariana et au-delà à proximité de la future route de Bizerte.

           - Au S-E, les coteaux situés entre Radès et la route GPI.

           - Au SUD, les pentes des collines qui dominent Bir-Kassa.

           - Au S-W, les pentes SE des coteaux de Bordj-Chakir.

           - Au N-W, les pentes SE du Djebel-Amar
».

Fig. 1. Relief de la ville de Tunis montrant un ensemble de collines qui la ceinturent.
Source : AA n°20, 1948, p. 19.

Synthétique, dans ce sens, est cette phrase que prononce Françis Jerrold et que reprend Bernard Zehrfuss « L’habitation quitte le marais pour s’élever vers des zones plus saines »26 pour accompagner son schéma (fig.2) et qui permet de comprendre qu’une maison, toute maison dans le quartier d’habitation d’El Menzah se définit d’abord comme un pied à terre « très bien aéré et magnifiquement orienté »27, « efficace par les vents dominants d’été »28.

Fig. 2. Schéma de parti de l’aménagement de Tunis.
Source : Zehrfuss B., 1950, p.15.

4. A l’échelle du quartier d’habitation : soleil, air et verdure entourent les maisons

4.1. Les barres autonomes tournées au soleil

Accrochées à un des coteaux les mieux exposés et ventilés repérés autour de Tunis, il s’agit maintenant pour les reconstructeurs de penser à l’organisation de ces maisons dans le quartier.

A El Menzah I, le regard qui embrasse des masses autonomes développées dans le sens vertical et associées à un espace vert peut saisir au même moment combien cet agencement urbain contraste avec l’alignement des immeubles de rapport dans la partie européenne de la ville de Tunis et avec la mitoyenneté caractéristique du tissu de sa médina. Se matérialise ainsi au cours des années 40, dans un espace tunisien péri-urbain, couvert d’oliviers et considéré « vierge », la recette athénienne annoncée en ces termes : « constructions hautes implantées à grande distance l’une de l’autre » devant « libérer le sol en faveur de larges surfaces vertes »29.

Fig. 3. Le lotissement El Menzah I.
Source : AA n°60, 1955, p. 88.

Retentit alors inévitablement la célèbre phrase de le Corbusier30 : Il faut tuer la rue corridor ! pour nous rappeler que cette forme urbaine qu’imposent au milieu du XXe siècle la charte d’Athènes et les CIAM dans les villes du monde en dépit des particularités culturelles et en inhibant « toute recherche d’autres modèles de logements »31 représente en réalité la phase finale d’une transformation progressive du traditionnel îlot urbain européen32.

L’organisation en barres parallèles tournées au soleil canonisée par l’avant-garde moderne depuis les années 20 et proclamée forme urbaine universelle vient ainsi cristalliser de manière radicale les expériences urbaines et architecturales de près d’un siècle hygiéniste ponctué par la problématique du logement ouvrier insalubre d’abord et par la lutte contre une redoutable « maladie de l’habitat », la tuberculose, ensuite.

Dans les pays industriels, les voix indignées des réformateurs, les enquêtes des médecins et les recherches des architectes avaient bien fini par démontrer que les misérables groupements d’habitations précaires et insalubres où se tasse le prolétariat tuaient au même moment où ils constituaient des foyers de contagion qui propageaient la maladie dans un cadre bâti qui ne pouvait l’arrêter.

S’était alors constituée au fil du temps une branche savante de la pratique architecturale qui plaçait l’hygiène au centre des préoccupations et où la question de l’ensoleillement des logements s’est vue propulsée au premier rang si bien qu’au bout de ce siècle expérimental, la charte annonce qu’« Introduire le soleil » est « le nouveau et le plus impératif devoir de l’architecte » car « la tuberculose s’installe là où le soleil ne pénètre pas »33.

En réalité, le bacile de Koch découvert depuis 1882 et se révélant sensible à la lumière, donne une véritable orientation aux recherches architecturales qui se veulent scientifiquement fondées comme le montrent à juste titre le graphique présenté par l’architecte Augustein Rey lauréat du concours du quatrième congrès international de tuberculose en 1905 à Paris (fig.4) ou les démonstrations de Walter Gropius publiées en 1931 (fig. 5).

Les médecins, avaient été les premiers à les prescrire, les architectes s’attelaient à matérialiser progressivement dans l’espace les traitements préventifs de la maladie: proscription des locaux ayant peu de fenêtres, mal orientés, masqués par leurs vis-à-vis, dédensification des tissus urbains, élargissement des rues, agrandissement, ouverture puis disparition des cours, etc.

Si en 1904 les barres isolées et indifférentes au tracé des rues qu’expose l’architecte Tony Garnier ( dans le cadre du concours lancé par la société Rothschild pour la construction d’habitations à bon marché à Paris) avait été considérées comme la réponse la plus innovante en renonçant entièrement, au nom de l’ensoleillement, à l’alignement traditionnel des immeubles parisiens et aux cours fermées34, la formule faisant du chemin depuis, finit par se présenter comme l’antidote urbain de la maladie par excellence. Antidote urbain que la charte, avec son ton didactique et ses préceptes simplement formulés, a diffusé depuis 1943 auprès des différents acteurs de la production du logement de masse.

L’îlot cède la place progressivement à la barre. L’un est discrédité, l’autre proclamée formule universelle de l’habitation salubre. Mais dès le départ, le positionnement de l’avant-garde de l’entre-deux-guerres qui prône, contrairement à ses ainés, une table rase du passé pour reconfigurer la ville des temps modernes, accorde aux deux figures urbaines, un rapport antinomique. L’une n’est en réalité que le négatif de l’autre et le dispositif des barres parallèles n’existe ou ne pouvait être inventé, pouvons-nous penser, que parce qu’il est tout ce que n’est pas le traditionnel îlot urbain européen.

Fig. 4. Dessin présenté par l’architecte A. Rey au quatrième Congrès international de tuberculose en 1905 à Paris.
Source : Lucan, J,1999, p.79.
Fig. 5. Dessins de l’architecte W. Gropius pour la comparaison de l'efficacité des immeubles d'habitation en fonction de leurs hauteurs et de leurs espacements.
Source : Gropius, W., 1995, p.119.

Dans le texte de la charte, construit sur la base d’un rapport d’opposition constant, ville ancienne versus ville moderne, nous pouvons lire que « l’alignement traditionnel des habitations sur le bord des rues n’assure d’insolation qu’à une partie minime des logis » et qu’il « entraine un dispositif obligé du volume bâti » avec des cours intérieures où « une façade sur quatre [ …] ne connait pas le soleil, tandis que les trois autres, par suite de l’étroitesse des rues, des cours et de l’ombre portée qui en résulte, en sont également à moitié privées »35.

Les barres autonomes se définissent donc dès le départ par l’absence de la cour, par l’abandon de la mitoyenneté et par une libération de l’alignement sur la rue.

Il faudrait bien sûr prêter attention aussi à la revendication égalitaire que porte en elle cette nouvelle forme urbaine. Le Corbusier écrit dans la charte « la société ne tolérera plus que des familles entières soient [ …] vouées au dépérissement »36. La recherche persistante d’une « certaine qualité de bien -être accessible à chacun hors de toute question d’argent »37 s’accompagne ainsi par le refus systématique que « des familles entières soient privées de lumière, d’air et d’espace »38.

C’est peut-être cette idée qui permet le mieux de saisir le sens qui habite la recette athénienne à laquelle les architectes allemands attribuent le néologisme « Zeilenbau », cette c’est-à-dire, ces rangées d'habitations parallèles juxtaposées à distance égale en étant orientées toutes au soleil.

Walter Gropius participe avec ses diagrammes (fig .5) à démontrer sa double efficacité alliant hygiène et économie constructive pour un accès égal à un espace de vie salubre. Les schémas où il présente une comparaison de plusieurs configurations d’immeubles d’habitations parallèles sont accompagnés par un texte39 qui décrit dans un premier temps une sorte de protocole d’analyse : « Répartition du terrain en rangées de constructions parallèles. Construction comparative d'une même portion de terrain avec des rangées de maisons de 2, 3, 4, 5, 6 ou 10 étages. Dans chaque cas, on répartit le même nombre de lits, donc la même superficie habitable (15m² par lit) dans les corps de bâtiment de différentes hauteurs; la densité de la population est donc la même ». Il expose ensuite ce qu'il appelle lui-même « résultat » en expliquant que « pour la même superficie de terrain à bâtir et la même densité de population, l'angle d'incidence de la lumière diminue entre les rangées de maisons plus elles ont d'étages ; l'ensoleillement est donc meilleur, et la proportion d'espace libre par lit augmente. L'espacement des rangées de maisons, par exemple, est d'environ le double de la hauteur du bâtiment pour trois étages, environ le triple pour dix étages, tandis que la proportion d'espace libre entre les rangées passe de 18 à 23 m² par lit ».

Or Cette démarche qui se veut rationnelle, presque mathématique au moment où la question du logement pour le plus grand nombre devient incessante, n’est certainement pas étrangère à la dérive du nouveau modèle urbain, visible déjà dans les dernières opérations de siedlungens (quartiers d’habitation) de Francfort conduits sous la direction de Ernst May dans les années 30, là où le quartier d’habitation n’obéit dans sa forme qu’à la course du soleil et à la loi de la série.

Ces opérations, comme les grands ensembles qui seront essaimés à profusion après la guerre, permettent de comprendre la résistance que rencontre l’avant-garde de l’entre-deux-guerres depuis les années 50 de la part d’une nouvelle génération des CIAM qui incarne une « modernité critique »40. Celle-ci se propose de réviser l’héritage de ses ainés, en l’occurrence Le Corbusier et Gropius, et dénonce la « stérilité abstraite » de leur « ville fonctionnelle »41.

La critique architecturale en général ne pardonnera pas au modèle athénien d’avoir éclaté l’îlot urbain, encapsulé les unités de voisinage dans des volumes répétitifs et solitaires, réduit la rue à un récipient pour la 4ème fonction urbaine codifiée « circuler ». « Ces utopies architecturales, sans hiérarchie et sans conflit, peut-on par exemple lire à ce sujet, masquent la lisibilité des rapports entre les espaces publics et les espaces privés, entre les émergences et le contexte, entre le collectif et l’individuel, à l’image de la société technocratique sans classe qu’elles supposent »42.

Le remplacement de l’échelle parcellaire par une échelle géométrique qui s’opère lors du passage de l’ilot à la barre marque ainsi le passage de « lieux situés » à un « espace de répétition, cartésien, atopique , isotrope »43 souligne Philippe Boudon.

4.2. La rue n’est pas « tuée » à El Menzah I

Il est clair qu’El Menzah I échappe magistralement à cette dérive du modèle et offre à voir, un îlot ouvert, matérialisant dans l’espace une sorte de compromis entre la norme hygiéniste codifiée par la charte et les règles de la composition urbaine des villes européennes en vigueur au XIXe siècle.

Les barres d’immeubles sont bien éloignées les unes des autres en étant associées à un espace vert qui permet de dédensifier et d’aérer la maille urbaine ainsi qu’à un réseau de rues hiérarchisé en fonction des vitesses (pour la sécurité des habitants et le confort des conducteurs) fidèlement aux préceptes athéniens. Mais voici ce détail qui change tout.

L’ensemble des composantes modernes codifiées pour le quartier d’habitation, immeubles, espace vert, ravitaillement et équipements collectifs, s’organise en fonction d’un tracé orthogonal de rues qui les met en relation. La configuration, la seule et emblématique décrite par la charte, schématisée maintes fois par le Corbusier, et supposée être celle de la ville radieuse de Marseille (si en plus de l’unité d’Habitation, le reste du projet avait été réalisé), cette configuration que l’on pourrait simplement résumer en un océan de verdure parsemé de plantations ,traversé de chemins de promenades et accueillant toutes les constructions, ne trouve donc pas son application dans ce premier quartier d’habitation à Tunis.

Ici, se détachent de la trame orthogonale et de manière hiérarchisée et composée, de multiples morceaux de verdure ordonnés et de tailles différentes, des constructions de taille et d’orientation différentes et un ensemble de rues qui ne se ressemblent pas. La plus grande de ces rues est au centre du quartier. A double voie, elle est flanquée des plus larges trottoirs et est bordée et soulignée par des arbres d’alignement, en l’occurrence des jacaranda qui participent à mettre en perspective le plus grand immeuble « Balkis », lui aussi, dérogeant, par sa taille et par sa mise en forme à la physionomie élémentaire des barres modernes44.

Fig. 6. Plan d'aménagement du lotissement d’Etat El Menzah I appelé encore « lotissement de Crémieuxville » en 1949. Une des barres orientées au nord-est sera finalement supprimée et remplacée par un espace vert.
Source : Archives Nationales de Tunisie. Versement n°74 de l'année 2008, boite 63.

Déployant au centre du quartier un corps central et deux corps latéraux et affichant une composition tripartite (base, corps, couronnement), il présente également un imposant porche d’entrée qui se place dans le prolongement de cette plus grande rue. Cette mise en scène urbaine est d’avantage accentuée par le traitement du fragment de verdure qui lui est exclusivement réservé.

Il représente ainsi l’une de ces « surfaces vertes compartimentées en petits éléments d’usage privé » que discrédite la charte en préconisant au retour une seule étendue verte partagée par l’ensemble des habitants. Les pelouses découpées selon des formes géométriques précises, les haies taillées en guise de contours et le mobilier urbain associé aux arbres d’alignement ne sont pas alors sans renvoyer à l’esthétique du jardin à la française « domestiqué » tel un « fragment ordonné de verdure »45, ce « salon à ciel ouvert », « ne prétendant pas au naturel, mais assumant les valeurs de l’artifice ».

Au départ, deux immeubles défavorisés du point de vue de l’orientation (orientés selon l’axe Nord-Est/Sud-Ouest) participent dans le cadre de cette organisation à générer un centre du quartier. Même s’il n’en subsiste qu’un, ce centre persiste, renforcé par l’espace vert qui remplace la barre éliminée et qui se distingue des autres surfaces vertes par sa plus grande taille (fig. 6 et 7).

Fig. 7. Le centre du lotissement El Menzah I.
Source : Réalités Tunisiennes, 1952, p.139.

Il ne s’agit donc pas de ce parc au contour imprécis, où chaque entité, l’arbre, la rue et l’immeuble est autonome mais d’une véritable composition urbaine qui met en relation, qui met en scène, qui hiérarchise des sous-espaces différenciés.

N’étant pas complètement « tuée » à El Menzah I, « la rue corridor » est donc reformulée pour s’éloigner du volume bâti tout en demeurant un organe essentiel de la vie urbaine. Elle y est additionnée aux espaces verts traités en paysages jardiniers propres à de multiples unités de voisinage, à des barres qui entretiennent encore des rapports avec le terrain notamment par une subtile différenciation des faces (avant-arrière), le tout s’organisant en fonction d’un centre privilégié.

Fig. 8. L’aire verte réservée à l’immeuble « Balkis ». modélisée à partir des plans des architectes.
Source : Dessin de l’auteure.

Nous pouvons aisément penser au rôle que joue l’ensemble de ces dispositifs pour produire un potentiel « espace situé » auquel peuvent s’identifier les habitants du quartier et qui évite « l’atomisation » du paysage attestée par exemple par S. Giedion lorsque la barre est élevée, dit-t-il, sans être intégrée à une structure urbaine46.

Apparaît alors en arrière fond de cette opération tunisienne, la référence à la version parisienne de la cité-jardin de l'entre-deux-guerres47 et précisément, à la doctrine de régularisation de l'école française d'urbanisme non seulement à travers ce tracé urbain régulier et hiérarchisé par la taille et par les plantations, mais aussi à travers la composition générale des immeubles et des multiples aires verdoyantes.

Cette mise en scène urbaine rappelle que la construction du quartier d’El Menzah I se fait à une époque charnière où le modèle des « progressistes » pour reprendre la catégorisation de Françoise Choay48, prend de l'élan au moment où celui des « nouveaux régularisateurs » bat en retraite.

Fig. 9. Documents graphiques de l'immeuble « Balkis » conçu par Marc Granger montrant la composition et la différenciation des façades ainsi que le traitement paysager de son aire verte privative.
Les dessins sont assemblés par l’auteure à partir de plusieurs fragments.
Source : Archives de la municipalité de Tunis. Dossier RVN9759/1953.

La cohabitation de cette hiérarchisation urbaine aux intonations néo-classiques avec l’ouverture caractéristique de l'espace moderne qui apparaît à travers les barres solitaires et leurs différentes formes de percements, renforce l'idée d’une hybridité. Hybridité, que nous sommes en mesure de soutenir d’avantage en découvrant dans les archives cette liste49 que nous laissent les reconstructeurs et où cohabitent les figures « progressistes » de Walter Gropius, Le Corbusier, Alexandre Klein ou Moise Guinsberg et les partisans de la composition urbaine comme Emanuel Pontrémoli, Eugène Beaudouin ou encore l'architecte et urbaniste français Alfred Agache principal acteur du Musée social.

El Menzah I construit dans les années 40 pourrait nous amener à penser également que le principe de l’alternative urbaine post moderne de l’îlot ouvert (Christain de Portzamparc par exemple) ressuscite d’une certaine manière une forme urbaine transitoire qui a existé et qui a marqué le passage des immeubles à cour des îlots fermés aux immeubles en barres. La description donnée par Christian Moley de cette forme transitoire du passé mérite ici d’être rapportée : « Conçu comme partie intégrante d’un schéma de circulation ,explique-il, l’ilot devient une « maille », un bouclage automobile autour d’immeubles en pourtour d’un grand espace vert fédérant une « unité de voisinage » [...] Il est formé de barres parallèles, qui le laissent ouvert et dont les façades orientées est-ouest exposent de manière considérée équivalente les logements [...] Abstrait de l’urbain, l’immeuble prend pour pôles le soleil et l’espace vert »50.

4.3. L’espace vert « prolongement du logis »

Fig. 3.
Source :

texte

5. A l’échelle de l’immeuble collectif d’habitation : la barre « sanatorium »

Sous texte 1

Fig. 3. Le lotissement El Menzah I.
Source : AA n°60, 1955, p. 88.

6. A L’échelle de l’appartement : le logement salubre

Fig. 3. Le lotissement El Menzah I.
Source : AA n°60, 1955, p. 88.

Sous texte 1

Conclusion

texte

Notes

1 Paradoxalement, lorsqu’il s’agissait de loger une population dite « musulmane » selon cette même catégorisation, ils avaient fait appel au génie des lieux qui leur offrait à voir des manifestations spatiales inédites et allaient même jusqu’à inventer une combinaison intelligente entre la recette hygiéniste moderne et la tradition hygiéniste ancrée dans les tissus médinals comme le montre par exemple la cité des Andalous conçue par Jean le Couteur à Bizerte. Voir Narjes Ben Abdelghani et Leïla Ammar, « Maison à cour et logements de recasement pour les populations musulmanes en Tunisie pendant la reconstruction, 1943-1955 », Al-Sabîl : Revue d’Histoire, d’Archéologie et d’Architecture Maghrébines [En ligne], n°5, Année 2018. URL : http://www.al-sabil.tn/?p=16507
2 A.N.T., série SG2, carton 158, dossier 3 : Rapports et comptes rendus relatifs à l’état des travaux de reconstruction à Sousse et à Bizerte, Folio 40, Rapport sur l’urbanisme en Tunisie, service d’architecture et d’urbanisme, 1944.
3 A.N.T., série SG2, carton 158, dossier 3 : Rapports et comptes rendus relatifs à l’état des travaux de reconstruction à Sousse et à Bizerte, Folio 85, Urbanisme, 1943, p. 5.
4 Le Corbusier, 1957, p. 39.
5 Le Corbusier, 1957, p. 38.
6 Le Corbusier, 1957, p. 39.
7 Le Corbusier, 1957, p. 40.
8 Zehrfuss, B., 1973 p. 18.
9 Zehrfuss, B., 1948, p. 16.
10 Zehrfuss B., 1950, p. 6.
11 Dhouib H., 2010.
12 Deloge M.,1955, p. 89.
13 Dans les dernières années de l’ère coloniale, ces groupes d’habitation prennent les noms de El Menzah Etat I ; El Menzah II ; El Menzah III ; Ismailia IV, Ismailia V, Ismailia VI.
14 Jerrold F., 1948, p.18.
15 Choay F., 1972.
16 La construction du quartier débute avec la construction des deux premiers immeubles « Virgile » et « le Zodiaque » en 1946 et s’achève avec l’inauguration du dernier immeuble « Balkis » en 1953 mais l’étude et la réalisation du quartier représentent l’application d’une doctrine générale établie à partir de 1943 par l’équipe de la reconstruction réunie dans le cadre des Services d'Architecture et d'Urbanisme sous la direction de Bernard Zehrfuss.
17 A.N.T., série SG14, carton 12, dossier 5 : Notes sur l'orientation des études de l'urbanisme pour la reconstruction de la Tunisie et des plans d'aménagement des villes effectués par Mr Zehrfuss architecte en chef du gouvernement, Folio 2, Tunis,1947, p. 31
18 A.N.T., série SG14, carton 12, dossier 5 : Notes sur l'orientation des études de l'urbanisme pour la reconstruction de la Tunisie et des plans d'aménagement des villes effectués par Mr Zehrfuss architecte en chef du gouvernement, Folio 2, Tunis,1947, p. 30.
19 A.N.T., série SG14, carton 12, dossier 5 : Notes sur l'orientation des études de l'urbanisme pour la reconstruction de la Tunisie et des plans d'aménagement des villes effectués par Mr Zehrfuss architecte en chef du gouvernement, Folio 2, Tunis,1947, p. 31.
20 Le Corbusier, 1957, p. 48.
21 Le Corbusier, 1957, p. 47.
22 Jerrold F., 1948, p. 19.
23 Jerrold F., 1948, p. 88.
24 Voir ses publications dans le Bulletin économique et social de la Tunisie (B.E.S.T) n°16,17,18, 22, 23.
25 Deloge M., 1948, p. 70.
26 Zehrfuss B., 1950, p.13.
27 A.N.T., série SG14, carton 12, dossier 5 : Notes sur l'orientation des études de l'urbanisme pour la reconstruction de la Tunisie et des plans d'aménagement des villes effectués par Mr Zehrfuss architecte en chef du gouvernement, Folio 2, Tunis,1947, p. 31.
28 Deloge M.,1955, p. 89.
29 Le Corbusier, 1957, p. 53.
30 Le Corbusier, 1994.
31 Reyner Banham. Cité par Frampton K., 2006, p. 290.
32 Castex J., Depaule J.-Ch. et Panerai Ph.,1977.
33 Le Corbusier,1957, p. 50 et 51.
34 Dumont M.-J, 1999, p. 58.
35 Le Corbusier,1957, p. 41.
36 Le Corbusier,1957, p. 50.
37 Le Corbusier,1957, p. 40.
38 Le Corbusier,1957, p. 40.
39 Gropius W., 1995, p. 118.
40 Bonillo J.-L, 2006, p. 17
41 Frampton K, 2006, p. 291.
42 Max A., 1976, p. 42.
43 Boudon Ph. (dir), 1991, p. 85.
44 Il convient de préciser que deux groupes de l’équipe de la reconstruction ont successivement pris en charge la conception du quartier. Entre elles existe un rapport conflictuel, notamment entre leurs chefs de file respectifs Bernard Zehrfuss puis Michel Deloge. Leurs divergences ne seront pas approchées dans le présent article mais elles méritent d’être restituées dans une contribution ultérieure.
45 Choay F., 1998, p. 221 et 222.
46 Giedion S., 1990, p. 469.
47 Après avoir été proche du modèle anglais, sa composition pittoresque et ses maisons individuelles, la cité-jardin parisienne donne progressivement une place importante à l'habitat collectif, à la préfabrication et à la standardisation (la cité de la Muette à Drancy de Lods et Beaudouin) et s'associe à un tracé des voies « à la française », clair et hiérarchisé. Loupiac C. et Mengin CH.,1997, p. 221.
48 Choay F., 1998. Qualifiant la génération des modernes de l’après 1914 de « progressistes », Françoise Choay les associe à "une doctrine architecturale systématique et exclusive qui permet à la modernité de prendre corps, et à laquelle, il revient de faire table rase du passé pour induire les fondements théoriques du nouvel ordre urbain". En contrepartie, elle associe la doctrine de la régularisation à l'école française d'urbanisme et atteste que de cette vision renouvelée de l'urbanisme haussmannien dans les premières années du XXe siècle ne manque pas d'alimenter la vision des progressistes. Elle la présente comme une fusion de trois influences majeures : L'œuvre de Eugène Hénard, le Musée social et l'urbanisme colonial de Lyautey au Maroc en affirmant que la pensée de cette école est développée en détail dans deux ouvrages : Le premier « Comment reconstruire nos cités détruites » est signé par Agache, Aubertin et Redont aidés pas Jaussely et Forestier et fait écho à l’enseignement- le premier de cette nature- délivré par Agache en 1915 à l’école des Sciences sociales. Le deuxième « Traité d’urbanisme » paru en 1913 et écrit par Joyant à la suite de l’expérience de l’urbanisation au Maroc. Elle remarque également qu'une partie de leurs objectifs coïncident avec ceux des progressistes, et les solutions qu'ils proposent bien que plus simples et moins systématiques, sont souvent proches de celles des progressistes.
49 A.N.T., série SG2, carton 158, dossier 3 : Rapports et comptes rendus relatifs à l’état des travaux de reconstruction à Sousse et à Bizerte, Folio 85, Urbanisme, 1943, p. 2.
50 Moley Ch.,1991, p. 177.
51 Choay F., 1998, p. 269.
52 Le Corbusier, 1957, p. 59 et 60.
53 Le Corbusier, 1957, p. 36.
54 A l’occasion du CIAM IV de 1933, sont analysées 33 villes européennes par les congressistes. Le texte de la charte d’Athènes sera publié dix années plus tard.
55 Ibid, p. 36.
56 Ibid, p. 36.

Bibliographie

Sources

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Auteur

Narjes Ben Abdelghani

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